Hors collection - Contrats de droit privé et contrats de droit administratif - 141

PASCAL CAILLE, MATHIAS LATINA

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contrat que le nom » en raison de « la prédominance exclusive d'une seule
volonté, agissant comme volonté unilatérale, qui dicte sa loi »18. Parce que
ces actes s'éloignaient trop du modèle classique, qu'ils étaient, aux dires
mêmes de Saleilles, non « des concours de volonté, en vue de dégager une
volonté commune »19 mais des « manifestations unilatérales de volontés
parallèles »20, la qualification de contrat leur a été initialement déniée21. La
doctrine majoritaire est, toutefois, finalement parvenue à un consensus
minimaliste22 en vertu duquel le contrat est un accord de volontés destiné
à créer des effets de droit, sans faire de la négociation ou de la définition
consensuelle de ces effets un critère nécessaire à la qualification de contrat.
Le droit privé des contrats a donc évolué afin de prendre en compte
l'existence de ces asymétries de pouvoir. Cette évolution s'est faite, en
premier lieu, par le biais des droits spéciaux. Le droit de la consommation a en effet été construit, à partir des années 1970, sur l'infériorité du
consommateur vis-à-vis du professionnel, dans le but avoué de rétablir un
certain équilibre des pouvoirs. S'agissant des relations entre professionnels, la réaction du législateur, quoique plus tardive, a été particulièrement
remarquée. En effet, le droit des « pratiques restrictives de concurrence »
prend en compte l'inégalité des différents opérateurs économiques afin de
protéger la partie faible, en particulier, contre les clauses abusives (C. com.,
art. L. 442-6, I, 2o) et la rupture brutale des relations commerciales établies
(C. com., art. L. 442-6, I, 5o). L'évolution s'est poursuivie, en second lieu,
avec l'ordonnance du 10 février 2016 portant réforme du droit des contrats,
du régime général et de la preuve des obligations23. Cette ordonnance
a intégré, non sans mal, dans le Code civil, la définition du contrat d'adhésion. Si le contrat de gré à gré est, aux termes de l'article 1110, alinéa 1, tel
que modifié par la loi de ratification du 20 avril 2018, le contrat dont les
18. Saleilles, De la déclaration de volonté. Contribution à l'étude de l'acte juridique dans
le code civil allemand, 1901, F. Pichon, art. 133, n° 89. V. aussi G. Berlioz, Le contrat
d'adhésion, LGDJ, 1973 ; Testu, « Le juge et le contrat d'adhésion », JCP 1993. I. 3673.
19. Ibid., spéc. n° 91.
20. Ibid.
21. V. aussi Hauriou, S. 1908. 3. 17 ; Duguit, Les transformations générales du droit
privé depuis le Code Napoléon, Paris, 1912, F. Alcan, p. 116 et s., spéc. p. 124 ; Traité de
droit constitutionnel, t. 1, 3e éd., 1927, E. de Boccard, p. 371, spéc. § 37.
22. J. Rochfeld, p. 426.
23. Th. Revet, « L'incohérent cantonnement, par l'Assemblée nationale, du domaine du
contrat d'adhésion aux contrats de masse », D. 2018. 124 : « l'ordonnance du 10 février 2016
a pris acte de ce que la volonté des parties ne constitue plus l'alpha et l'oméga du contrat ;
du moment qu'une volonté accepte le contenu d'un acte juridique qu'elle n'a ni élaboré ni
pu discuter, cet acte peut accéder au titre de contrat, exactement comme quand la volonté
des deux parties en a déterminé le contenu ».
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