Hors collection - Contrats de droit privé et contrats de droit administratif - 23

JEAN-FRANçOIS HAMELIN, ÉTIENNE MULLER

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Troisièmement, il faut souligner que la situation statutaire comporte
également des avantages pour les administrés, notamment au plan de la
responsabilité.
Ainsi, la responsabilité extra-contractuelle de l'Administration comporte
certains aspects particulièrement favorables pour la victime (cumul de la
faute personnelle et de la faute de service, présomption du défaut d'entretien normal de l'ouvrage public...)62.
En outre, les actes unilatéraux sont plus aisément contestables par les
justiciables que ne le sont les contrats administratifs. La fin de la jurisprudence Martin, qui compensait l'irrecevabilité du recours pour excès de
pouvoir contre les contrats par son ouverture à l'encontre des actes détachables de leur conclusion63, au profit d'un recours de plein contentieux
en contestation de la validité du contrat64, aura surtout servi à renforcer
la sécurité juridique des contrats de l'Administration par une limitation
drastique des moyens invocables et une possibilité accrue de régularisation
en cours d'exécution.
Toutefois, l'Administration ne peut fonctionner uniquement sur la base
de ce type de situations « statutaires », non contractuelles.
L'Administration n'a en effet de pouvoir de décision unilatérale que
dans la mesure des compétences qui lui sont conférées par l'ordre juridique.
Ainsi, il est évident que la réquisition, par exemple, ne saurait être le
moyen habituel par lequel les personnes publiques se procurent des biens et
des services65. Elles n'ont d'autre possibilité, pour ce faire, que d'entrer dans
un rapport contractuel avec des tiers, lesquels n'accepteront de s'y engager
que dans des conditions, notamment financières, auxquelles ils consentent.
On en revient, finalement, aux idées d'Hauriou. Le maître toulousain,
pour qui « le régime d'État (...) est essentiellement un régime de séparation »66 (notamment entre l'État et les personnes privées) avait bien compris
que l'institution politique ne se suffit pas à elle-même et a besoin pour
fonctionner d'entrer dans le commerce juridique, où domine le contrat,
acte de prévision et support presque naturel de l'échange économique67.
p. 909, concl. Blum, GAJA) ; sur les limites de ce rapprochement, v. cependant : B. Plessix,
Droit administratif, 2e éd., LexisNexis, Paris, 2018, § 967, p. 1206-1207.
62. V. G. Clamour, « Les chausse-trapes du contrat », note préc., AJDA 2017, p. 2418.
63. CE, 4 août 1905, Martin, D. 1907, III, p. 49, concl. Romieu.
64. CE, ass., 4 avr. 2014, n° 358994, Dépt de Tarn-et-Garonne, AJDA 2014, p. 1035,
chron. A. Bretonneau et J. Lessi, p. 2061, note F. Brenet, RJEP 2014, n° 721, p. 14,
note J.-F. Lafaix, RFDA 2014, p. 425, concl. B. Dacosta et p. 438, note P. Delvolvé.
65. L. Richer, F. Lichère, Droit des contrats administratifs, 10e éd., LGDJ, Paris, 2016,
p. 59.
66. M. Hauriou, Principes de droit public, préc., p. 22.
67. Ibid., p. 668.
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