Hors collection - Contrats de droit privé et contrats de droit administratif - 293

FABRICE ROSA, DAVID RICCARDI

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professionnels à des sanctions véritablement dissuasives, au seul motif
que leur faute n'est pas sanctionnée sur le terrain extra-contractuel. C'est
pourquoi une seconde technique nous semble pouvoir être envisagée qui
parviendrait à renforcer la portée normative de la responsabilité civile dans
le cadre du principe de réparation intégrale.

2. Le relâchement de l'exigence causale
Problématique de la perte de chance. - L'exigence traditionnelle d'un
lien de causalité peut emporter une limitation de la réparation lorsqu'il
n'est pas certain que, sans le fait dommageable, le créancier victime aurait
évité le dommage. En présence d'un aléa qui affecte la réalisation même
du dommage, le juge n'ordonne la réparation que d'une perte de chance
entendue comme la disparition future d'une espérance de réaliser un profit
ou d'éviter une perte102. En pratique, la victime ne peut obtenir qu'une
fraction de la réparation du préjudice final souverainement déterminée
par les juges du fond103.
Si elle est justifiée sur le plan juridique, cette solution a pour effet de
relativiser la portée de la condamnation et d'estomper sa fonction normative. Elle peut même conduire à écarter toute réparation lorsqu'il est certain
que la victime aurait été exposée à la réalisation du dommage même en
l'absence de faute de l'auteur du dommage104. Cette conséquence a dû apparaître bien souvent inopportune tant il est vrai que le juge ordonne parfois
la réparation intégrale du dommage final105. Sans prétendre à l'exhaustivité,
on examinera quelques manifestations de cette tendance jurisprudentielle.
Responsabilité du diagnostiqueur. - On en trouvera une première
illustration en matière de vente immobilière dans le contentieux relatif
à la responsabilité de l'expert qui délivre un diagnostic pour renseigner
102. La Cour de cassation définit plus synthétiquement la perte de chance comme la
« disparition d'une éventualité favorable » (par ex. Cass. 1re civ., 22 mars 2012, n° 11-10935,
Bull. civ. I, n° 68).
103. Cass. 1re civ., 20 juin 2018, n° 17-11473, PB, qui invite les juges à mesurer « le préjudice
à la chance perdue d'éviter le dommage qui s'est réalisé ».
104. Lorsqu'un médecin manque à son obligation d'information, la jurisprudence écarte
toute réparation « s'il peut être tenu pour certain que la faute n'a pas eu de conséquence
sur l'état de santé du patient » (Cass. 2e civ., 22 juin 2017, n° 16-21296), i.e. que ce dernier
aurait en toute hypothèse subi l'opération.
105. C'était la position de la Cour de cassation en matière médicale avant l'arrêt du
7 février 1990 (Cass. 1re civ., 7 févr. 1990, Bull. civ. I, n° 39 ; comp. auparavant : Cass. 1re civ.,
11 février 1986, Bull. civ. I, n° 24).

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