Les Intégrales - Les sociétés civiles immobilières - 11e - 346

LES SOCIÉTÉS CIVILES IMMOBILIÈRES

d'ailleurs contraire à l'intérêt social qu'une société consente une mise à disposition à titre
gratuit d'un bien lui appartenant sans aucune contrepartie.

§ II - Contrepartie équilibrée
941 Disqualification éventuelle de la contrepartie. - Il est donc possible à la société de
retirer un avantage du commodat. Il convient néanmoins d'être vigilant sur le quantum
de cet avantage, car il ne doit toutefois pas constituer une contrepartie équivalant à une
rémunération qui serait assimilée à un loyer. Il en résulterait une requalification de la
convention liant la société et son associé (en bail) avec les conséquences fiscales qui en
découleraient (imposition des loyers...).
942 Exemple. - Dans une espèce où une SCI a mis à la disposition d'époux un bien immobilier lui appartenant, sans versement de loyers, les occupants s'engageant à effectuer
des travaux de rénovation, la Cour de cassation approuve les juges du fond d'avoir considéré que l'occupation n'avait pas été consentie gratuitement mais en contrepartie de
travaux importants ayant permis de transformer une ruine en logement habitable : la
SCI, qui a notifié aux époux, deux ans plus tard, son intention de mettre fin à cette occupation et les a assignés afin de voir reconnaître l'existence d'un contrat de prêt à usage
pour obtenir leur expulsion, est déboutée de sa demande d'expulsion ; la SCI est
condamnée à établir un contrat de bail écrit2. Dans l'équilibre contractuel attaché à une
convention à titre gratuit, un avantage excessif retiré par la société prêteur entraîne une
requalification de la convention de commodat en convention de bail. Dans le même sens,
la Cour de cassation a rejeté le pourvoi contre un arrêt qui avait requalifié le commodat
en bail alors que le pourvoi soutenait que le remboursement par l'emprunteur de
charges au prêteur, de l'entretien de l'immeuble et du remboursement des impôts, ne
sauraient constituer un prix sérieux dès lors que les charges ainsi supportées restent inférieures à la valeur de la mise à disposition3.
943 Aspects fiscaux. - Au plan fiscal, la mise à disposition par la SCI d'un immeuble au
profit d'un associé par un commodat, en ce qu'elle ne génère pas le versement de loyer,
ne génère pas d'imposition. En revanche, la requalification de la convention en contrat de
bail entraîne :

- la requalification des versements effectués par l'occupant en loyer avec l'application
de la fiscalité qui s'y rapporte4 ;
- accessoirement la perte de la qualification (et de l'exonération qui s'y attache) de résidence principale au regard de l'impôt sur les plus-values.
944 Exemples de contrepartie équilibrée. - Une contrepartie équilibrée peut découler par
exemple du paiement par l'usager à titre gratuit des charges d'habitation ou de copropriété de l'immeuble : le paiement par l'associé à la société de ces charges repose alors
sur la convention de commodat. L'article 1886 du Code civil précise que l'emprunteur
doit en principe supporter les dépenses nécessaires pour l'utilisation de la chose. La SCI
peut alors justifier d'un intérêt à l'opération puisqu'elle est ainsi libérée des frais d'entretien de l'immeuble et de certaines charges. En revanche, la taxe foncière est en principe
supportée par le propriétaire et non par le commodataire, de même que les grosses

(2)
(3)
(4)

valorisation ne représentant nullement la contrepartie onéreuse de la mise à disposition des terres ; C. MAURO,
« Permanence et évolution du commodat », Defrénois 2000, nº 18, p. 1024.
Cass. 3e civ., 9 avr. 2013, nº 12-15478, Banque et droit, 2013, nº 150, p. 48, note M. STORCK.
Cass. 3e civ., 14 janv. 2004, nº 02-12663, Bull. civ. III, nº 6 ; RDC 2004, 708, obs. J.-B. SEUBE.
TA Paris, 1re sect., 23 mars 2004, JurisData nº 2004-242781 ; Dr. fisc. 2004, nº 29, comm. nº 625, concl. comm.
gouv. M.-G. MERLOZ ; RJF 8-9/04, nº 89 ; JCP N, 22 oct. 2004, nº 43, 1513, note J.-P. GARÇON : les sommes versées
par l'occupant d'un logement à la SCI propriétaire qui correspondent aux échéances mensuelles du prêt conclu
pour l'acquisition de l'immeuble et aux cotisations d'assurance-vie garantissant son remboursement constituent des
recettes brutes imposables dès lors que ces versements sont la contrepartie de l'occupation de l'immeuble.

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