Droits africains - Le droit de l'Union africaine - 1re - 266

266 DROIT DE L'UNION AFRICAINE

285. Créée par les articles 30 et suivants de la Charte africaine des droits de
l'homme et des peuples, la Commission africaine des droits de l'homme
et des peuples s'était vu confier une double mission de promotion et de
protection des droits de l'homme. Comme l'observe Pierre-Étienne Kenfack, en confiant à la Commission africaine des droits de l'homme et des
peuples un rôle de protection, « l'ambition des rédacteurs de la charte africaine était d'éviter la création d'une juridiction pour respecter la tradition
africaine »96. Dans sa mission de protection, la Commission a la possibilité
de soumettre une requête à la Cour. Les organisations intergouvernementales africaines sont également des requérants privilégiés de la Cour africaine des droits de l'homme.
Une grande complémentarité existe en effet entre la Cour et la Commission. La Commission africaine peut saisir la Cour d'une affaire portant sur
la violation des droits de la Charte africaine par un État partie au Protocole.
La Commission est devenue une voie vers la Cour dans le cas où l'État incriminé n'a pas fait la déclaration au titre de l'article 34.6 du Protocole qui
autorise la saisine directe de la Cour par les individus et les ONG, comme
en témoigne le rôle actuel de la Cour.
286. Les juges. - La Cour se compose de 11 juges, ressortissants des États membres de l'Union africaine. Le nombre de juges est réparti par région
d'Afrique : Est (2 juges), Nord (2), Centre (2), Ouest (3) et Sud (2). La
Cour ne peut pas comprendre deux juges de même nationalité.
Les premiers juges ont été élus en janvier 2006, à Khartoum (Soudan), puis
ont prêté serment devant l'Assemblée des chefs d'État et de gouvernement
relative à l'usine de Chorzów (Allemagne c/Pologne), Série A, fasc. nº 17 ; CPJI, arrêt, 27 juin 1937,
Affaire des prises d'eau à la Meuse (Pays-Bas c/Belgique), Série A/B, fasc. nº 70. Voir Nouvel (Y.),
« La recevabilité des demandes reconventionnelles devant la Cour internationale de justice
à la lumière de deux ordonnances récentes », AFDI 1998, p. 324.
96. Kenfack (P. E.), « Commentaire sous l'article 5 du Protocole », dans Kamto (M.) (ss. la dir.),
La Charte africaine des droits de l'homme et des peuples et le Protocole créant la Cour africaine des droits
de l'homme, Bruylant, 2012, p. 1270. Mutoy Mubiala faisait la même observation en disant que
le contentieux africain tel qu'il émerge de la pratique de l'arbre palabre militait en faveur du
rejet de la solution judiciaire : Mutoy (M.), « La Cour africaine des droits de l'homme et des
peuples : mimétisme institutionnel ou avancée judiciaire ? », RGDIP 1998, p. 765 et s. Le juge
Kéba M'Baye écrivait de son côté que « nous avons recours à la justice pour régler les conflits
à l'amiable, mais nous sommes rarement en conflit au sens contentieux du terme » : « Rapport introductif sur la Charte africaine des droits de l'homme et des peuples », dans Droits de
l'homme et des peuples en Afrique et la Charte africaine, Commission internationale des juristes,
Genève, 1986, p. 28-29). Deux observations sont à faire : 1. si le lien évident entre la Commission de Banjul et la CADHP est aujourd'hui nécessaire, il est autant évident que la Commission de Banjul n'existe pas par explication historiciste liée à une certaine « palabre africaine ». Elle a sa principale raison d'être dans l'évolution et l'ancrage relative des droits de
l'homme dans nos sociétés. Les débiteurs de ces droits et, même les créanciers ont besoin des
démarches actuelles de la Commission ; 2. Comme dans les autres systèmes de droit de
l'homme, ce rôle cessera d'être évident.

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