Bibliothèque de droit social - Tome 75 - Le système de retraite à l'épreuve de son financement - 63

INTRODUCTION

154. Les principes qui fondent le système contemporain de retraite sont
nombreux et variés. Certains sont génériques, c'est-à-dire qu'ils justifient la mise
en place de n'importe quel modèle de protection sociale. C'est le cas notamment
de notions comme celles de justice sociale, de cohésion sociale, ou encore de solidarité. D'autres en revanche caractérisent plus spécifiquement le modèle français.
Parmi eux, une place particulière doit être réservée aux principes de contributivité
et de redistributivité. Ces principes constituent en quelque sorte la summa divisio
du système de retraite, en ce sens que toute l'organisation matérielle en vigueur
vise, soit à renforcer la logique contributive, soit à accentuer la logique redistributive du système de retraite.
155. Pour être plus concret, la présente étude s'attachera tout d'abord à
démontrer que le système de retraite repose sur une forte logique contributive. Cela
signifie que les pensions et autres avantages servis aux personnes âgées ne sont pas
désintéressés. Ils ont été conçus comme une contrepartie accordée en échange du
versement de cotisations. Pour matérialiser le principe de contributivité, les pouvoirs publics ont placé la technique de l'assurance sociale au cœur du système de
retraite. L'assurance « vieillesse » a par ailleurs plusieurs caractéristiques. Il s'agit
tout d'abord d'une assurance professionnelle puisqu'elle ne couvre que les travailleurs et leur famille. L'assurance « vieillesse » est en outre organisée sur une logique
corporatiste : les travailleurs sont regroupés dans différents régimes en fonction de
l'emploi exercé ou du secteur géographique dans lequel ils se situent.
Ces deux principes - contributivité et corporatisme - expliquent à eux seuls
une bonne partie de l'organisation financière du système de retraite. Ils justifient
la mise en place de prélèvements obligatoires assis sur les revenus du travail. Ils
permettent de comprendre le caractère hétérogène de la couverture « vieillesse ».
Ils rendent enfin légitime l'intervention des partenaires sociaux dans la gestion
administrative et financière des caisses de retraite.
156. La contributivité est assortie d'un autre principe : celui d'équité. Bien
que le droit de la Sécurité sociale s'y réfère explicitement87, force est de constater
que la notion d'équité ne fait l'objet d'aucune définition légale ou jurisprudentielle et qu'elle est très difficile à cerner88. Il est pourtant important de savoir à
quoi elle renvoie et de comprendre l'usage qui en est fait en matière de retraite.
Pour dresser les contours de la notion d'équité, il s'agira dès lors de recouper les
analyses doctrinales effectuées sur cette question et d'analyser les modalités
concrètes de fonctionnement du système de retraite. Les recherches menées sur ce
sujet permettront de dégager une idée importante : l'équité semble se caractériser
par une volonté de poser des critères de distinction entre les individus, de façon à
pouvoir ensuite accorder des droits et avantages spécifiques à certaines personnes
ou à certaines catégories de personnes, en fonction de leur mérite présumé.
Dans la pratique, l'équité se traduit principalement de deux façons : en matière
d'assurance « vieillesse », elle implique le maintien d'une pluralité de régimes de
retraite capables d'adapter les conditions d'assurance et les modalités d'ouverture
des droits à pension en fonction des particularités du secteur d'activité. Elle
87. Art. L. 111-2-1 II CSS.
88. « Plutôt que de faire jouer le principe - au demeurant indéfinissable - d'équité [...] »
(DUPEYROUX (J.-J.), BORGETTO (M.) et LAFORE (R.), Droit de la sécurité sociale, Paris :
Dalloz, 18e éd., 2015, p. 88)

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