Bibliothèque de droit social - Tome 76 - L'évaluation professionnelle des salariés - 210

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L'ÉVALUATION PROFESSIONNELLE DES SALARIÉS

performance du salarié sont, sur ce fondement, exclus de toute finalité évaluative.
Tel est par exemple le cas de la géolocalisation318.
Alors que la géolocalisation pourrait renseigner l'employeur sur la performance des salariés, l'utilisation de cette technique demeure strictement limitée sur
le plan juridique à une finalité de contrôle319. La Cour de cassation a ainsi précisé
par un arrêt rendu le 3 novembre 2011 que « l'utilisation d'un système de géolocalisation pour assurer le contrôle de la durée du travail, laquelle n'est licite que
lorsque ce contrôle ne peut pas être fait par un autre moyen, n'est pas justifiée
lorsque le salarié dispose d'une liberté dans l'organisation du travail »320. La Cour
de cassation a également relevé qu'« un système de géolocalisation ne [pouvait]
être utilisé par l'employeur pour d'autres finalités que celles qui [avaient] été
déclarées auprès de la Commission nationale de l'informatique et des libertés ».
La chambre sociale soumet ainsi l'utilisation du dispositif de géolocalisation à
deux conditions cumulatives. L'une repose sur la « subsidiarité » - ce n'est qu'à
défaut d'autres moyens que la géolocalisation peut être mise en œuvre. L'autre
s'incarne dans une « incompatibilité juridique » entre la géolocalisation et une
liberté d'organisation du salarié321. Cette seconde condition, conséquence de la
prise en considération de la protection de la vie personnelle d'un salarié qui a la
possibilité d'aménager son temps professionnel et son temps personnel, fait obstacle au détournement de la géolocalisation au profit de l'évaluation pour ces
salariés. Elle pose ainsi une limite à toute velléité de profiter de ce dispositif pour
juger des qualités professionnelles d'un salarié relativement autonome.
Les finalités admissibles de la géolocalisation sont par ailleurs limitativement
énumérées dans une délibération de la Cnil. Cette dernière évoque la sûreté ou la
sécurité de l'employé ou des biens de l'entreprise, l'amélioration de l'allocation
des moyens, le suivi et la facturation de la prestation et enfin le suivi du temps de
travail lorsque ce suivi ne peut être réalisé par d'autres moyens322. Il s'ensuit que si
318. Témoin du succès de la géolocalisation, une norme simplifiée pour la déclaration à la
CNIL des dispositifs de géolocalisation installés par les entreprises dans les véhicules mis à disposition
de leurs employés a par ailleurs été adoptée : Délibération n° 2006-067 du 16 mars 2006 portant
adoption d'une norme simplifiée concernant les traitements automatisés de données à caractère
personnel mis en œuvre par les organismes publics ou privés destinés à géolocaliser les véhicules
utilisés par leurs employés. Cette norme a été modifiée en 2015, inspirée notamment par un souci de
protection de la vie privée du salarié : Norme simplifiée n° 51 : Délibération n° 2015-165 du 4 juin
2015 portant adoption d'une norme simplifiée concernant les traitements automatisés de données à
caractère personnel mis en œuvre par les organismes publics ou privés destinés à géolocaliser les
véhicules utilisés par leurs employés. La norme prévoit également que, sauf disposition légale, seule la
vitesse moyenne et non la vitesse maximale peut être traitée. Elle renforce également les exigences en
matière de sécurité des données (art. 7).
319. En dehors du lieu de travail, la géolocalisation fait également l'objet d'une attention
particulière lorsqu'elle est utilisée par les services de police, Loi n° 2014-372 du 28 mars 2014 relative
à la géolocalisation, JORF n° 0075 du 29 mars 2014, p. 6123. H. Matsopoulou, « La surveillance par
géolocalisation à l'épreuve de la Convention européenne des droits de l'homme », D. 2011, p. 724.
320. Cass. soc. 3 nov. 2011, n° 10-18.036, Bull. Civ. V, n° 247 ; Com. Com. Elec. n° 3, mars 2012,
comm. 32, A. Lepage, « La géolocalisation devant la chambre sociale de la Cour de cassation » ;
Ph. Flores, « La géolocalisation et le contrôle de la durée du travail : l'état des cartes », SSL, 19 déc.
2011, n° 1518, p. 7 et s ; RDT 2012, p. 156, obs. B. Bossu et T. Morgenroth ; JCP S 2012, n° 1054,
note G. Loiseau.
321. A. Lepage, « La géolocalisation devant la chambre sociale de la Cour de cassation », Com.
Com. Elec. n° 3, mars 2012, comm. 32.
322. Délibération n° 2006-066 du 16 mars 2006 portant adoption d'une recommandation relative
à la mise en œuvre de dispositifs destinés à géolocaliser les véhicules automobiles utilisés par les
employés d'un organisme privé ou public.

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