Bibliothèque de droit social - Tome 77 - Droit du travail et prévention - 158

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DROIT DU TRAVAIL ET PRÉVENTION

de risques environnementaux, à tout le moins dans les textes, car en pratique69, le
principe de précaution s'applique également à la santé70.
159. S'agissant des mesures de précaution, elles consistent en des mesures
d'action ou d'abstention71. Ces mesures doivent en outre être provisoires et proportionnées72. Enfin, ces mesures ne vont pas jusqu'à garantir le risque zéro73. Il semble
donc qu'une conception modérée du principe de précaution soit privilégiée.
160. Encore faut-il en définir les destinataires que sont, en premier lieu, les
autorités publiques74. Le principe de précaution a ainsi pu être mobilisé dans le
69. La formulation actuelle du principe de précaution ne vise que l'environnement (article 5 de
la Charte de l'environnement, précitée). Le débat reste ouvert quant à l'opportunité d'étendre
officiellement le principe de précaution aux questions de santé humaine. V. AUVERLOT (D.),
HAMELIN (J.), PUJOL (J-L.), Le principe de précaution : quelques réflexions sur sa mise en œuvre,
Commissariat général à la stratégie et à la prospective, Document de travail, n° 2013-05, septembre
2013, 22 p., p. 17 et s. En faveur d'une extension à la santé, v. not. Assemblée nationale, TA n° 837,
Résolution sur la mise en œuvre du principe de précaution, précitée.
70. Il faut souligner que la plupart des jurisprudences relatives au principe de précaution sont relatives
à la santé et à la sécurité sanitaire. Le principe de précaution était d'ailleurs mobilisé dans ces domaines
bien avant sa consécration constitutionnelle. L'exemple de l'ESB (encéphalopathie spongiforme bovine)
dans le cadre de l'affaire de la vache folle en est tout à fait révélateur (v. not. CE, 24 février 1999, n° 192465,
« Société Pro-Nat », publié au Recueil Lebon, t. 614 ; ROUYERE (A.), L'exigence de précaution saisie par
le juge, RFDA, 2002, p.  266). Sur l'application du principe de précaution dans le domaine sanitaire
v.  FOUCHER (K.), Principe de précaution et risque sanitaire. Recherche sur l'encadrement juridique de
l'incertitude scientifique, ouvrage précité. V. égal. FOUCHER (K.), De la possibilité de valider une mesure
de précaution... sans reconnaître le principe de précaution, Constitutions, 2015, p. 602.
71. V. la thèse de Madame Karine Foucher dans laquelle l'auteur insiste sur le fait que le principe
de précaution s'inscrit dans une gestion à la fois conservatoire et permissive du risque : FOUCHER (K.),
Principe de précaution et risque sanitaire. Recherche sur l'encadrement juridique de l'incertitude
scientifique, ouvrage précité.
72. C'est ce qui ressort de la lettre même de l'article 5 de la Charte de l'environnement qui vise « la
mise en œuvre de procédures d'évaluation des risques et à l'adoption de mesures provisoires et
proportionnées afin de parer à la réalisation du dommage ». Sur le caractère provisoire et proportionné
des mesures de précaution, v. égal. Assemblée nationale, TA n° 837, Résolution sur la mise en œuvre du
principe de précaution, précitée, points  8 et  9. Par ailleurs, plusieurs arrêts ont confirmé le caractère
provisoire des mesures adoptées sur le fondement du principe de précaution, v. Cons. const., décision
n°  2014-694 DC  du 28  mai 2014 « Loi  relative à l'interdiction de la culture de variétés de maïs
génétiquement modifié », affirmant de la constitutionnalité de cette loi moratoire, notamment compte
tenu de son caractère temporaire ; Cons. const., décision n° 20168-737 DC du 4 août 2016 « Loi pour la
reconquête de la biodiversité, de la nature et des paysages », spéc.  cons. n°  13 : « les dispositions
contestées ont pour objet de favoriser l'amélioration constante de la protection de l'environnement et ne
font pas obstacle à ce que le législateur modifie ou abroge des mesures adoptées provisoirement en
application de l'article 5 de la Charte de l'environnement pour mettre en œuvre le principe de précaution.
Dès lors le grief tiré de ce que ces dispositions méconnaîtraient le principe de précaution est inopérant ».
73. En ce sens v. Cons. const., décision n° 2008-564 DC du 19 juin 2008, décision précitée. Dans cette
décision, le Conseil constitutionnel précise que « le fait que les conditions techniques auxquelles sont
soumises les cultures d'organismes génétiquement modifiés autorisés n'excluent pas la présence accidentelle
de tels organismes dans d'autres productions, ne constitue pas une méconnaissance du principe de
précaution » (21e considérant). C'est admettre que le risque zéro n'existe pas, même en matière de précaution.
74. En ce sens v. Cons. const., décision n° 2008-564 DC du 19 juin 2008, décision précitée. V.
égal. CE Ass., 3 octobre 2008, n° 297931, « Commune d'Annecy », arrêt précité. Sur l'application
du principe de précaution aux autorités publiques v. GOSSEMENT (A.), Le principe de précaution.
Essai sur l'incidence de l'incertitude scientifique sur la décision et la responsabilité publiques, Paris,
L'Harmattan, collection Logiques juridiques, 2003, 454 p. ; DEGUERGUE (M.), La responsabilité
administrative et le principe de précaution, RJE, numéro spécial, 2000, p. 105 ; PONTIER (J-M.),
La puissance publique et la prévention des risques, AJDA, 2003, p.  1752 ; AUVERLOT (D.),
HAMELIN (J.), PUJOL (J-L.), Le principe de précaution : quelques réflexions sur sa mise en œuvre,
rapport précité, p. 15.
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