Bibliothèque de droit social - Tome 77 - Droit du travail et prévention - 268

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DROIT DU TRAVAIL ET PRÉVENTION

1. L'exclusion classique de la responsabilité civile et pénale du salarié
301. L'exclusion de la responsabilité civile du salarié. La consécration d'une
obligation de sécurité salariale a suscité des craintes de la part d'une partie de la
doctrine : « cette orientation remet en cause un dogme fondateur du droit français
du travail dans le domaine de la santé et de la sécurité, dogme selon lequel le salarié
ne peut être considéré comme responsable en cas d'accident »45. Cette obligation
expresse de prévention au travail pouvait être de nature à remettre en cause les
règles qui gouvernent la responsabilité civile du salarié. Ici encore, la subordination
qui caractérise la relation de travail implique une protection civile du salarié.
En effet, le travailleur subordonné jouit d'une quasi-immunité civile tant en
matière contractuelle dans ses rapports avec l'employeur46, qu'en matière délictuelle, dans ses rapports avec les tiers et avec les autres salariés de l'entreprise47. En
particulier, concernant la responsabilité civile délictuelle48, c'est la responsabilité
de l'employeur qui sera recherchée si le salarié cause un dommage à des tiers49.
45. LATTES  (J.-M.), Le corps du salarié dans l'entreprise, in Mélanges dédiés au Président
Michel Despax, Toulouse, Presses de l'Université de Sciences Sociales (PUSS), 2001, 552 p., cit. p. 350.
46. En matière contractuelle, le principe est que le salarié ne répond pas, vis-à-vis de l'employeur,
des risques de l'exploitation que sont la mauvaise exécution ou l'exécution tardive du contrat de
travail. En vertu d'une jurisprudence constante (Cass. soc. 27 novembre 1958, Bull. civ. IV, n° 1259,
note BRETHE DE LA GRESSAY (J.), RTD civ. 1959, p. 753) seule la faute lourde du salarié permet
d'engager sa responsabilité à vis de l'employeur. Qui est appréciée de manière très restrictive puisque
la faute lourde du salarié est celle qui se caractérise par l'intention de nuire à l'employeur, en vertu ici
encore d'une jurisprudence constante depuis un arrêt de 1990, Cass.  soc.  29  novembre 1990,
n° 88-40.618, Bull. civ. V, n° 599, note COUTURIER (G.), La faute lourde du salarié, Dr. soc., 1991,
p. 105). Cette restriction des hypothèses d'engagement de la responsabilité contractuelle du salarié est
dérogatoire au droit commun, qui n'exige pas de faute qualifiée. Cela n'exclut toutefois pas l'usage par
l'employeur de son pouvoir disciplinaire, qui présente l'avantage de ne pas faire intervenir le juge, sauf
son contrôle éventuel, a posteriori. Néanmoins, et en lien avec le principe selon lequel le salarié ne doit
pas répondre des risques de l'exploitation, les sanctions pécuniaires sont interdites (Article L.1331-2
du Code du travail : « les amendes ou autres sanctions pécuniaires sont interdites. Toute disposition
ou stipulation contraire est réputée non écrite »). En tout état cause, ce régime restrictif poursuit un
objectif clair : il revient à l'employeur de supporter les risques de dysfonctionnements de l'outil
productif. Sur la responsabilité contractuelle du salarié v. BLAISE (H.), La responsabilité pécuniaire
du salarié envers l'employeur, RJS, 1996, p. 68 ; LAYDU (J.-B.), La responsabilité civile du salarié,
contractuelle ou délictuelle ?, Dr. soc., 1995, p.  146 ; RADE  (C.), Droit du travail et responsabilité
civile, Paris, LGDJ, collection Bibliothèque de droit privé, Tome 282, 1997, 398 p, n° 221 et s. MILLET
(F.), La notion de risque et ses fonctions en droit privé, Clermont-Ferrand, Les Presses Universitaires de
la Faculté de Droit de Clermont-Ferrand, LGDJ, 2011, 356 p., p. 90 et s., PASQUIER (T.), L'économie
du contrat de travail. Conception et destin d'un type contractuel, LGDJ, collection Bibliothèque de droit
social, Tome 53, 2010, 415 p., n° 113 et s. Cette exigence de faute lourde semble avoir été atténuée lors
d'un récent arrêt, v. Cass. crim. 14 novembre 2017, n° 16-85.161, ADAM (P.), De la responsabilité
civile du salarié, Droit social, 2018, p. 465.
47. Sur l'ensemble de cette question voir RADE  (C.), Droit du travail et responsabilité civile,
Paris, LGDJ, collection Bibliothèque de droit privé, Tome 282, 1997, 398 p. ; RADE (C.), Droit social
et responsabilité civile, Dr. soc., 1995 p. 495. FABRE-MAGNAN (M.), Le droit du travail vu du droit
civil : l'unité du droit des obligations, SSL, 1095, 28 octobre 2002.
48. Sur la responsabilité civile délictuelle du salarié en particulier : RADE (C.), Droit du travail
et responsabilité civile, ouvrage précité, n° 315 et s. ; PASQUIER (T.), L'économie du contrat de travail.
Conception et destin d'un type contractuel, ouvrage précité, n°  117 et s. ; FABRE-MAGNAN  (M.),
Droit des obligations, Tome 2 - Responsabilité civile et quasi-contrats, Paris, Presses Universitaires de
France (PUF), collection Thémis droit, 3e édition mise à jour, 2013, 523 p., p. 364 et s. ; ROCHEFELD
(J.), Les grandes notions du droit privé, Paris, Presses Universitaires de France (PUF), collection
Thémis droit, 2011, 576 p., p. 506 et s.
49. Article  1384 al.  5 du Code civil : « les maîtres et les commettants (sont responsables), du
dommage causé par leurs domestiques et leurs préposés dans les fonctions auxquelles ils les ont
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