Manuel - Droit de la distribution - 2e - 378

DROIT DE LA DISTRIBUTION

462. Publicité cachée. - On insistera cependant sur le fait qu'à
l'heure d'Internet, l'une des pratiques publicitaires en passe de devenir
la pratique trompeuse par excellence, qui n'est pas nouvelle mais connaît
une extraordinaire recrudescence dans le cadre des nouvelles techniques
commerciales et de communication, est tout simplement la publicité qui
ne dit pas son nom, autrement dit la publicité cachée ou déguisée4.
Or la liste des pratiques réputées déloyales en toutes circonstances devrait
permettre de couvrir certains cas de publicité déguisée5. À défaut, la notion
de pratique commerciale trompeuse par omission pourrait trouver là un terrain d'élection6. C'est ainsi, par exemple, que les vidéos d'un « youtubeur »
vantant les mérites de produits d'une marque sur commande de celle-ci
sans l'indiquer d'une manière ou d'une autre participent d'une pratique commerciale trompeuse7. Les comparateurs de prix offrent aussi, dans certains
cas, des illustrations frappantes de publicités tout à la fois déguisées et déformantes, qui peuvent recevoir la qualification de pratique commerciale trompeuse. C'est ainsi qu'un comparateur de prix a pu être considéré comme
assurant indirectement la publicité des produits ou services bénéficiant d'un
référencement prioritaire payant, devant dès lors être qualifié de prestataire
de service commercial et publicitaire. Il a dans le même temps été considéré
comme se rendant coupable de pratique commerciale trompeuse, faute
d'identification claire des référencements prioritaires8.
C'est aussi par la voie de l'obligation d'information que le législateur s'efforce aujourd'hui de lutter contre les publicités déguisées et, plus généralement, contre les pratiques déloyales vis-à-vis des consommateurs qui se
4. V. not. dans cette perspective la communication de la Commission européenne sur « les plateformes en
ligne et le marché unique numérique - Perspectives et défis pour l'Europe », et en particulier les développements sur l'information et la confiance des consommateurs, 25 mai 2016, COM (2016) 288 final. En
témoigne également la version 2016 du guide de la Commission européenne sur les pratiques commerciales déloyales, qui consacre près de 30 pages aux pratiques sur Internet : Guidance on the Implementation/Application of Directive 2005/29/EC on Unfair Commercial Practices, 25 mai 2016, SWD (2016) 163 final, p. 121
et s.
5. Est en particulier réputé trompeur le fait « d'utiliser un contenu rédactionnel dans les médias pour faire
la promotion d'un produit ou d'un service alors que le professionnel a financé celle-ci lui-même, sans l'indiquer clairement dans le contenu ou à l'aide d'images ou de sons clairement identifiables par le consommateur » (C. consom., art. L. 121-4, 11º).
6. L'article L. 121-3 du Code de la consommation stigmatise en effet une pratique qui « omet, dissimule ou
fournit de façon inintelligible, ambiguë ou à contretemps une information substantielle » ou qui « n'indique
pas sa véritable intention commerciale dès lors que celle-ci ne ressort pas déjà du contexte » (v. supra,
nº 435).
7. Les services de la DGCCRF ont enquêté sur les pratiques menées auprès de certains « youtubeurs », qui
ont développé une véritable notoriété, et qui sont rémunérés par certaines marques pour vanter les mérites de leurs produits, sans que le caractère publicitaire du contenu diffusé soit indiqué au public. La qualification de pratique commerciale trompeuse a été retenue et des transactions ont été proposées.
8. Cass. com., 4 déc. 2012, nº 11-27729 : Bull. civ. IV, nº 221 ; CCE 2013, comm. 14, obs. LOISEAU G. (au sujet
du site « Leguide.com »). Dans le même esprit, le comparateur « Kelkoo » avait été condamné à s'identifier
comme site publicitaire, les juges du fond ayant considéré que la présentation des produits sur le site revenait à en faire la promotion. Il avait également été condamné à rectifier un certain nombre de ses pratiques jugées trompeuses (absence de mise à jour en temps réel des prix, d'indication des frais de port...). Sur
ce dernier point, la Cour de cassation a néanmoins dû exercer sa censure car les juges du fond avaient
retenu l'existence de pratiques commerciales trompeuses sans vérifier si ces pratiques étaient susceptibles
d'altérer de manière substantielle le comportement économique du consommateur : Cass. com., 29 nov.
2011, nº 10-27402 : Bull. civ. IV, nº 195 ; Contrats, conc. consom. 2012, comm. 56, obs. RAYMOND G.

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