Manuel - Droit de la distribution - 2e - 59

Le recours aux intermédiaires

- ou dont la profession consiste essentiellement, soit à vendre des marchandises de toute nature, soit à recueillir les commandes ou à recevoir des marchandises à traiter, manutentionner ou transporter.
Ce dernier cas est doté de la plus grande portée. En tant qu'il vend des
marchandises ou recueille des commandes, le gérant n'est donc protégé par
le statut que s'il exerce son activité à titre professionnel143, et en outre dans
des conditions qui doivent trahir sa situation de dépendance économique :
- Une exclusivité : le gérant doit être fourni « exclusivement ou presque
exclusivement par une seule entreprise », ou bien recueillir des commandes « pour le compte d'une seule entreprise ». Cette condition
peut être difficile à cerner lorsqu'est en cause la « presque » ou quasiexclusivité. En l'absence de précisions légales144, l'appréciation est
abandonnée aux juges du fond, de sorte que les assiettes et taux sont
très variables. On considère généralement, sur le modèle du droit antitrust, que le taux d'approvisionnement devrait avoisiner les 80 %145.
- Un local « fourni ou agréé » par l'entreprise mère : le gérant doit nécessairement exercer sa profession dans un local. Ce n'est pas tant la propriété du local qui importe, que le fait que l'entreprise mère ait pu en
déterminer ou valider les caractéristiques. L'agrément peut être
tacite146.
- Des « conditions et prix imposés » par l'entreprise mère : la loi ne distinguant pas, les conditions imposées peuvent être aussi bien des conditions de travail (ex. : horaires et itinéraires)147 que des conditions commerciales (ex. : politique de marque)148, étant rappelé qu'il n'est pas
nécessaire que ces contraintes atteignent le seuil d'une subordination
juridique. La notion de prix imposés fait, quant à elle, l'objet d'une
conception propre qui n'est pas celle du droit de la concurrence149, et
qui est souvent plus souple150.
51. Statut. - Si l'on résume, le gérant est soumis à la législation
sociale (C. trav., art. L. 7321-1)151, mais conserve sa qualité qui n'est pas
143. Seul ou avec autrui, peu importe : Cass. soc., 12 févr. 2014, nº 12-28160 : Concurrences nº 2-2014,
p. 107, obs. FERRIER D.
144. Cette absence ne contrarie pas les exigences de l'art. 6 CEDH : Cass. soc., 5 déc. 2012, nº 11-20460 :
Bull. civ. V, nº 327 ; JCP S 2013, 1122, note LAHALLE Th.
145. MALAURIE-VIGNAL M., nº 1157. Ex. : Cass. soc., 12 févr. 2014, préc.
146. Cass. soc., 16 sept. 2015, nº 14-17371 : publié au Bulletin ; Concurrences nº 1-2016, p. 106,
obs. MARTIN A.-C. ; AJCA 2015, p. 481, obs. LECOURT A. ; D. 2016, p. 964, obs. FERRIER D. (maintien de l'agrément d'un local qui n'est plus conforme aux normes recommandées par poursuite d'une relation commerciale).
147. Cass. soc., 4 déc. 2001, nº 99-41265, préc.
148. Cass. soc., 13 janv. 1972, préc.
149. Cass. soc., 16 sept. 2015, préc.
150. FERRIER D., art préc.
151. Comment comprendre la formule de l'article L. 7321-1, apparue avec la recodification en 2008, selon
laquelle les dispositions du Code du travail sont applicables « dans la mesure de ce qui est prévu au présent
titre » ? A en croire la Cour de cassation, il s'agirait d'une malfaçon : étant « issu d'une codification à droit
constant », le texte ne serait porteur d'aucune restriction (Cass. ass. plén., 9 janv. 2015, nº 13-80967 :
Bull. plén., nº 1 ; RDT 2015, p. 183, obs. FERRIER N.).

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