Manuel - Responsabilité administrative - 2e - 200

RESPONSABILITÉ ADMINISTRATIVE

d'enrichissement personnel233 commet également une faute de cette
nature.
222. Actions de la victime contre l'agent et/ou l'administration. -
Rappelons qu'initialement la distinction de la faute personnelle et de la
faute de service conduisait à envisager la seule responsabilité de l'agent et
la compétence judiciaire dans le premier cas, la seule responsabilité de
l'administration et la compétence administrative dans le second. Aujourd'hui, en cas de faute de service, le juge judiciaire reste incompétent et
l'administration doit élever le conflit234. En cas de faute personnelle, le
cumul de fautes et le cumul intégral de responsabilités permettent à présent à la victime d'agir contre l'agent devant le juge judiciaire ou contre
l'administration devant le juge administratif. En général, elle préfère agir
contre l'administration. Mais la victime peut aussi faire le choix d'agir en
parallèle contre l'agent et contre la personne publique devant chaque ordre
juridictionnel compétent : le Tribunal des conflits a admis explicitement en
2014235 que la victime peut mener simultanément ces deux poursuites.
223. Actions récursoires entre l'agent et l'administration. - Une
fois la victime indemnisée, il reste à envisager la répartition de la charge
de la dette entre l'agent et l'administration, ce qui relève des actions
récursoires qui seront étudiées ultérieurement236. On notera simplement
233. CE, 2 mars 2007, nº 283257, Sté Banque française commerciale de l'océan indien, JCP A 2007.2231,
comm. MUSCAT.
234. Si l'administration n'a pas élevé le conflit, elle est tenue de couvrir l'agent pour les condamnations
civiles prononcées à son encontre. Ceci relève de la protection fonctionnelle des agents publics, instaurée
d'abord par les textes (notamment par l'article 11 de la loi nº 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et
obligations des fonctionnaires) puis développée par la jurisprudence. Le Conseil d'État précise à ce
sujet qu'« il résulte d'un principe général du droit que, lorsqu'un agent public est mis en cause par un
tiers à raison de ses fonctions, il incombe à la collectivité dont il dépend de le couvrir des condamnations
civiles prononcées contre lui, dans la mesure où une faute personnelle détachable du service ne lui est pas
imputable, de lui accorder sa protection dans le cas où il fait l'objet de poursuites pénales, sauf s'il a commis une faute personnelle, et, à moins qu'un motif d'intérêt général ne s'y oppose, de le protéger contre les
menaces, violences, voies de fait, injures, diffamations ou outrages dont il est l'objet ». CE, 13 janv. 2017,
nº 386799 : AJFP 2017, p. 174 ; AJDA 2017, p. 80, note Froger (cet arrêt étend cette protection aux collaborateurs occasionnels du service public). V. NOËL J. « Les évolutions récentes de la protection fonctionnelle »,
RDP 2019, p. 349.
235. « Considérant que, eu égard à sa gravité et aux objectifs purement personnels poursuivis par son
auteur, la faute commise par le maire de la commune de Ventabren doit être regardée comme une faute
personnelle détachable du service ; que la juridiction judiciaire, saisie d'une action civile exercée accessoirement à l'action publique, est dès lors compétente pour connaître de la demande d'indemnisation présentée par Mme Berthet contre M. Filippi ; Considérant, toutefois, que la faute du maire de Ventabren, commise à l'occasion de l'exercice de ses fonctions, n'est pas, alors même qu'elle a fait l'objet d'une
condamnation par le juge pénal, dépourvue de tout lien avec le service ; que Mme Berthet ne saurait dès
lors être privée de la possibilité de poursuivre, devant la juridiction administrative, la responsabilité de la
commune ; Considérant qu'il appartiendra seulement à la juridiction judiciaire et à la juridiction administrative, si elles estiment devoir allouer une indemnité à Mme Berthet en réparation du préjudice dont elle
se prévaut, de veiller à ce que l'intéressée n'obtienne pas une réparation supérieure à la valeur du préjudice subi du fait de la faute commise » : TC, 19 mai 2014, nº 3939, Mme Berthet c/Filippi, précité. Le Tribunal
des conflits a également réaffirmé que la compétence juridictionnelle ne dépend que de la nature de la
faute commise par l'agent : si la faute est détachable du service, elle relève de la compétence du juge administratif et ce, même si le recours ne vise que l'engagement de la responsabilité personnelle de l'agent. TC,
15 juin 2015, nº 4007, AJFP 2016, p. 115 ; AJCT 2015, p. 519, note ROUAULT.
236. V. infra, nº 584 et s.

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