Systèmes - Les sources constitutionnelles du droit administratif - 10e - 116

Les sources constitutionnelles du droit administratif

IV.

Liberté contractuelle et droit public

Reflet de la liberté individuelle et de l'autonomie de la volonté, la liberté
contractuelle est le socle du droit civil. Depuis 1804, elle est affirmée avec
force par le Code civil. Après la réécriture par l'ordonnance du 10 février
2016 de l'ensemble des dispositions de ce code relatives aux contrats et au
régime des obligations, l'article 1103, qui a repris, en les modifiant légèrement, les termes de l'ancien article 1134, dispose que « les contrats légalement formés tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faits ».
La liberté contractuelle ne s'imposait pas en droit public avec la même
évidence. Disposant du pouvoir de prendre des décisions unilatérales, les
personnes publiques ont moins besoin que les particuliers de recourir au
contrat. Le contrat suppose en outre une égalité entre les partenaires qu'il
unit alors qu'administrations et administrés se trouvent placés sur des
plans différents.

Le contrat n'en est pas moins pour les administrations un procédé de
plus en plus familier. Il se développe dans les domaines où il est utilisé de
longue date : l'achat par l'administration de biens et de services, le financement de travaux publics, la gestion de certains services publics confiés à
une entreprise privée, le recrutement d'agents publics non titulaires. Il
apparaît dans de nouveaux domaines : l'action sociale, avec notamment,
regroupés sous la dénomination de contrat unique d'insertion, le contrat initiative emploi dans le secteur marchand et le contrat d'accompagnement
dans l'emploi dans le secteur non marchand, ou, pour les étrangers qui
arrivent en France, le contrat d'intégration républicaine ; l'action économique et l'aménagement du territoire ; le pilotage de l'action publique et la
modernisation de l'État. Les personnes publiques contractent de plus en
plus entre elles : le contrat est un instrument privilégié de relations entre
les collectivités territoriales et l'État, au travers en particulier des contrats
de plan entre l'État et les régions ; les collectivités territoriales passent des
contrats entre elles pour organiser leur coopération et mener des actions
communes ; les contrats dits de performance ou de service public définissent les rapports de l'État et des grands établissements ou entreprises
publics. Des contrats de service et des contrats d'objectifs sont préparés
au sein même d'une administration pour définir ses projets, mobiliser ses
agents, programmer ses moyens : les contrats d'objectifs passés entre le
Conseil d'État et les cours administratives d'appel pour la période 20022007 ont fortement contribué à la réduction des délais de jugement devant
les cours. Le Conseil d'État a consacré à ces évolutions les considérations
générales de son rapport public de 2008, intitulées le contrat, mode d'action
publique et de production de normes.
Ce recours accru au contrat s'accompagne d'un enrichissement du droit
des contrats publics. Les impératifs constitutionnels y sont présents tant
pour définir la liberté contractuelle des personnes publiques (A) que pour

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