Systèmes - Les sources constitutionnelles du droit administratif - 10e - 181

Les institutions

V.

Service public et secteur public

Dans les grandes constructions de la jurisprudence administrative de la
fin du XIXe siècle, service public, personne publique et droit public recouvraient le même champ. Le service public était alors la « pierre angulaire »
du droit administratif.
Avec le développement, après la Première Guerre mondiale, des interventions économiques et sociales de l'État, cette homogénéité a disparu.
D'un côté est apparu le service public industriel et commercial, placé sous
un régime de droit privé (T. confl., 22 janv. 1921, Sté commerciale de l'Ouest
africain). D'un autre côté des personnes privées ont été chargées de missions de service public (CE, 20 déc. 1935, Établissements Vézia ; 13 mai
1938, Caisse primaire Aide et Protection). Le service public était en crise.
Puis, à partir de 1954, la notion de service public a retrouvé une place
éminente en droit administratif. Un courant jurisprudentiel recourt à elle
pour définir l'agent public (CE, 4 juin 1954, Vingtain et Affortit), les travaux
publics (T. confl., 28 mars 1955, Effimieff), les contrats administratifs (CE,
20 avr. 1956, Époux Bertin et Ministre de l'Agriculture c/ consorts Grimouard),
le domaine public (CE, 19 oct. 1956, Sté le Béton). Les grands principes du
service public, notamment la continuité (CE, 7 juill. 1950, Dehaene) et l'égalité (CE, 9 mars 1951, Sté des concerts du conservatoire) sont dans le même
temps réaffirmés.
Ces évolutions du droit administratif reposent sur des données constitutionnelles. D'une part, les règles constitutionnelles précisent l'étendue du
champ d'action de la puissance publique et tissent en conséquence des
liens entre service public et secteur public (A). D'autre part, la valeur constitutionnelle des principes qui gouvernent le service public se trouve pleinement consacrée (B).

A. Les liens constitutionnels entre service public et secteur
public
Service public et secteur public ne se confondent pas. Les deux notions
se recoupent certes mais chacune est aussi partiellement étrangère à l'autre. Il est vrai que le processus de privatisation tend à faire disparaître les
entreprises publiques du secteur concurrentiel qui, telles les banques nationalisées ou la régie Renault, n'avaient pas de mission de service public. Il
n'en demeure pas moins qu'une fraction des services publics est gérée par
des personnes privées, investies d'une mission de service public mais extérieures au secteur public, qu'elles aient une forme associative, comme les
fédérations sportives par exemple, ou qu'il s'agisse d'entreprises délégataires de service public, assurant, entre autres, l'alimentation en eau, le traitement des déchets ménagers ou les transports urbains. Enfin toute trace
de service public ne disparaît pas nécessairement avec la privatisation : les
radios et télévisions privées, les entreprises commerciales de transport

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