Systèmes - Les sources constitutionnelles du droit administratif - 10e - 51

Les normes

immigration, asile, coopération douanière et policière deviennent des sujets
d'action en commun. Mettant fin à la construction en piliers issue du traité
de Maastricht, le traité de Lisbonne intègre sans distinction aux compétences de l'Union l'ensemble des attributions précédemment reconnues à la
Communauté. L'Union européenne a ainsi des conséquences sur tous les
aspects du droit, dans un mouvement profond de convergence des règles
juridiques, qui entraîne l'harmonisation des législations et l'adoption de dispositions communes.
Dans cette perspective, un rôle éminent revient au droit dérivé. Après
l'arrêt Nicolo, le Conseil d'État a reconnu la supériorité sur les lois, même
plus récentes, des règlements communautaires (29 sept. 1990, Boisdet) et
des directives (28 févr. 1992, Stés Rothmans International et Philip Morris).
Ces décisions sont à situer dans un contexte qui a progressivement
éteint la querelle entre le Conseil d'État et la Cour de justice sur l'autorité
des directives.
Constatant que, dans la pratique, les directives sont souvent rédigées
dans des termes qui laissent peu de marge aux autorités nationales pour
déterminer les modalités de leur application, la Cour de justice a jugé que,
même non transposée, une directive suffisamment précise était directement applicable dans les États membres (17 déc. 1970, Sté SACE et 4 déc.
1974, Van Duyn). Le Conseil d'État a, dans un premier temps, refusé de suivre la Cour de justice dans cette voie, qui s'éloigne de la distinction établie
par les stipulations du traité de Rome entre règlements et directives. À l'occasion de la contestation par Daniel Cohn-Bendit du refus d'abrogation de
l'arrêté d'expulsion dont il avait été l'objet en 1968, le Conseil d'État a ainsi
rappelé que l'application des directives en droit interne suppose des mesures nationales de transposition et qu'en l'absence de telles mesures, la
légalité d'une décision individuelle ne s'apprécie pas au regard d'une directive (22 déc. 1978, Ministre de l'Intérieur c/ Cohn-Bendit).
Très vif après cet arrêt, le conflit s'est apaisé, en raison d'évolutions
ultérieures, tant de la Cour de justice que du Conseil d'État.
La Cour de justice a montré que son souci est moins de promouvoir
l'autorité des directives que d'inciter les États à prendre les mesures nationales nécessaires à leur application. Ainsi elle a jugé qu'une directive ne
produit d'effet direct qu'après l'expiration du délai imparti pour en assurer
la transposition (5 avr. 1979, Ministère public c/ Ratti). Cet effet direct est en
outre limité aux rapports des citoyens avec l'État : en l'absence de mesure
de transposition, une directive n'a pas d'« effet horizontal » entre les
citoyens mais peut seulement, selon un « effet vertical ascendant », être
invoquée, après l'expiration du délai de transposition, à l'encontre de
l'État qui a manqué à son obligation de prendre les mesures qu'elle impliquait en droit interne (26 févr. 1986, Marshall et 12 mai 1987, Ministère public
c/ Traen).

Systèmes - Les sources constitutionnelles du droit administratif - 10e

Table des matières de la publication Systèmes - Les sources constitutionnelles du droit administratif - 10e