Hors collection - Regards des juristes d'Amérique latine sur la réforme du droit des obligations - 57

MARIO CASTILLO FREyRE

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ont rendu ces œuvres impérissables. Et je crois que la réponse est très
simple car le code français de 1804 a représenté, dans l'histoire du droit,
le moment clef de son actualisation et de son ré-ordonnancement, après
plusieurs siècles d'absence, dans le monde européen, de corpus normatifs
d'une telle envergure.
Le code français représente, à cet égard, un avant et un après.
Non pas qu'avec lui se fussent inventées les institutions et les figures
juridiques du droit civil ; évidemment que non, puisque la grande majorité
d'entre elles puisent leurs racines dans le droit romain ou dans les droits
intermédiaires. Mais ce qui est incontestable est que ce texte est apparu
dans un monde où l'imprimerie existait déjà, où l'on ne devait pas transcrire à la plume les codes, où l'interrelation entre les nations et les milieux
académiques commençait à s'envisager de manière beaucoup plus fluide
que lors des décennies et des siècles précédents.
Dans un tel contexte, ce code, et la doctrine qui lui est associée, ont été
les étendards de la culture française dans le monde juridique, représentant
un processus d'illustration sans équivalent, ni avant ni après.
Certes, les codes qui lui ont succédé ont aussi laissé des apports importants à la culture juridique, mais le Code Napoléon a été le premier.
Karl Benz a bien fait fonctionner la première automobile, les frères Wright
ont bien fait voler le premier avion, même si, au cours des nombreuses
années d'existence de l'automobile et de l'aviation, de nombreux engins ont
sillonné les pistes et les cieux, bien plus avancés que les modèles de ceux
qui inventèrent ces moyens de transport. Mais n'oublions pas que tous se
sont déplacés en vertu des mêmes principes physiques.
Nous, qui avons suivi l'évolution du droit français, sommes conscients
du fait que le code de 1804 a fait l'objet d'innombrables modifications et
que même les articles ayant conservé leur texte de début du xixe siècle, sont
compris de manière radicalement différente par rapport à leur sens littéral.
Il vient à ma mémoire que, étant encore étudiant en droit, je travaillais
à mon mémoire de maîtrise et, en analysant l'évolution de la doctrine et de
la jurisprudence sur la Vente de la chose d'autrui, on pouvait voir comment
la règle de la nullité s'était transformée, en quelques décennies, en exception, puisque la validité de cette figure était alors devenue une règle.
À partir de cette époque, j'ai commencé à éprouver de l'admiration pour
ces sociétés qui, au cours de leur histoire, ont démontré leur maturité sur
le plan juridique, tant pour leur développement législatif, jurisprudentiel
et doctrinaire, que pour le fait d'avoir été conscientes que l'évolution du
droit ne passe pas nécessairement par la modification des normes légales
et des codes.

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