Systèmes - Le budget de l'Etat : la LOLF - 4e - 163

Des affectations de recettes

recours à cette procédure d'affectation. Force est de reconnaître que la formule
est susceptible de rencontrer des interprétations variées. Les travaux préparatoires de la loi organique ne se sont d'ailleurs pas risqués à indiquer précisément
laquelle devrait être privilégiée.
Il est donc revenu au Conseil constitutionnel d'éclairer la notion de « relation
directe », tâche délicate puisqu'il s'agissait, en l'espèce, d'« interpréter dans un sens
réaliste cette règle très rigoureuse, que ne respectent pleinement qu'un petit nombre
de comptes actuels »2. Le considérant 51 de la décision du Conseil constitutionnel
s'essaye donc à formuler l'intention supposée du législateur organique : « il ressort
des travaux parlementaires qu'en imposant cette condition, le législateur a entendu
limiter les possibilités de dérogation à la règle de non-affectation des recettes au sein
du budget de l'État, sans pour autant faire obstacle aux exigences de bonne gestion
des ressources publiques ».
Ce faisant, le Conseil constitutionnel a, en quelque sorte, avalisé une conception souple, puisque la règle, formellement rigoureuse, posée dans le texte de la
loi organique devra composer dans chaque cas d'espèce avec les « exigences de
bonne gestion des ressources publiques », notion imprécise où peuvent se développer largement des considérations d'opportunité.
Bien qu'elle affirme s'appuyer sur les travaux préparatoires de la loi organique, cette décision ne permet pas de savoir dans quelle mesure le Conseil
constitutionnel a pris en considération le fait que le texte adopté par l'Assemblée
nationale en deuxième lecture dessinait un équilibre entre la suppression totale
des comptes d'affectation spéciale, votée par elle en première lecture, et leur
maintien, voté par le Sénat en première lecture. La notion de « relation directe » -
qui n'est pas une disposition accessoire mais constitue justement le point nodal
du compromis politique entre les deux assemblées quant à l'existence même
des comptes d'affectation spéciale - aurait donc pu légitimement faire l'objet
d'une interprétation stricte par le Conseil constitutionnel. Nonobstant la souplesse
dont il a fait preuve dans sa décision de principe sur la loi organique, le Conseil
constitutionnel a censuré sur ce fondement la disposition qui prévoyait que le
compte d'affectation spéciale alimenté par une fraction du produit des amendes
des radars automatiques pourrait financer la compensation versée par l'État
aux banques au titre des prêts « permis de conduire » accordés aux jeunes3.
En revanche ce compte finance le fichier national du permis de conduire et le
traitement automatisé des amendes, trois quarts environ du produit global de
celles-ci en constituent les recettes.
Par ailleurs, la décision du Conseil restait muette sur le point de savoir si les
comptes existant à la date d'entrée en vigueur de la loi organique devraient être
conformes - ou se conformer, pour l'occasion - à l'exigence de « relation directe »,
quelle que puisse être l'interprétation qu'il convient de donner à la notion. Le
silence du Conseil sur les comptes d'affectation spéciale doit être rapproché de
2. Jacques lAuze, « La loi organique devant le Conseil constitutionnel : une conformité sous
réserve », RFFP, n° 76, novembre 2001, p. 175.
3. Décision n° 2005-530 DC du 29 décembre 2005 sur la loi de finances pour 2006.

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