Systèmes - Les grandes affaires de responsabilité de la puissance publique - 13

Introduction
scandale. Je privilégie ici la première acception, pour envisager les
grands procès indemnitaires au regard du caractère marquant des
faits qui sont à leur origine. Certaines affaires ont par leur ampleur,
leur dimension médiatique, les traces qu'elles ont laissées dans
notre droit ou dans notre mémoire une place privilégiée. Elles
concernent pour la plupart des événements qui ont fait un nombre
important de victimes. De ce point de vue, les fluctuations sont évidentes
: entre les victimes d'une catastrophe naturelle, celles d'un
accident technologique ou des effets d'un médicament, les variations
sont grandes. Toutefois la dimension collective, que les juristes
envisagent sous l'angle du préjudice collectif, du dommage de
masse ou du risque sériel2
, est un critère essentiel.
Certaines affaires ont été révélées au grand jour grâce à la ténacité
de lanceurs d'alerte. Ainsi, le docteur Irène Frachon a tenu un
rôle notable dans l'affaire du Mediator. Le travail de la journaliste
Anne-Marie Casteret, plume de l'hebdomadaire « l'Événement du
jeudi », a été un élément déclencheur de l'affaire du sang
contaminé3
. Quant aux insuffisances de l'action publique face à l'épisans
nécessiter l'action d'un lanceur d'alerte partidémie
de Covid-19 en France, elles font l'objet d'investigations
journalistiques4
culier. Les catastrophes naturelles ou industrielles se révèlent d'elles-mêmes
: qu'il s'agisse de l'explosion qui eut lieu au sein de
l'usine AZF le 21 septembre 2001 à Toulouse, ou de la submersion
de la commune de la Faute-sur-Mer causée par la tempête Xynthia
dans la nuit du 27 au 28 février 2010.
Comprendre le déroulement d'une affaire nécessite de reconstituer
le récit du feuilleton contentieux qu'elle a suscité. Ce feuilleton
est alimenté par la dualité de juridictions à la française. Une même
affaire peut mêler des responsabilités d'acteurs publics et privés.
Certaines affaires ont ainsi pu mobiliser le juge administratif, en
principe juge de l'Administration, et/ou le juge judiciaire, qui se prononce
en principe sur la responsabilité des personnes privées (ou de
la puissance publique dans les cas où sa responsabilité échappe à la
compétence administrative). Surtout, ces affaires sollicitent les juridictions
pénales de droit commun et, si un ministre est mis en
cause, la Cour de justice de la République. Une appréhension
2. GUÉGAN-LÉCUYER A., Dommages de masse et responsabilité civile, LGDJ, 2006. V. aussi
LIENHARD C., « Pour un droit des catastrophes », D. 1995. 91.
3. CASTERET A.-M., « Le rapport qui accuse la transfusion sanguine », L'Événement du jeudi,
25 avr.-1er
mai 1991.
4. V. notamment une enquête en cinq volets du journal Le Monde :DAVET G., LHOMME F., « Aux
racines de la crise sanitaire française », Le Monde, du 5 au 9 mai 2020.
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