Systèmes - Les grandes affaires de responsabilité de la puissance publique - 39

L'amiante
responsabilité et du manquement de l'employeur à son obligation de
sécurité. Ensuite, elle est étendue à l'ensemble des salariés qui
prouvent avoir été exposés à l'amiante : « en application des règles
de droit commun régissant l'obligation de sécurité de l'employeur,
(...) le salarié qui justifie d'une exposition à l'amiante, générant un
risque élevé de développer une pathologie grave, peut agir contre
son employeur, pour manquement de ce dernier à son obligation
de sécurité, quand bien même il n'aurait pas travaillé dans l'un des
établissements mentionnés à l'article 41 de la loi du 23 déc. 1998
modifiée »30
. Enfin, la chambre sociale de la Cour de cassation a
élargi encore le champ de cette reconnaissance : depuis 2019, elle
considère que tout salarié qui fait face à un risque élevé de développer
une pathologie grave peut être indemnisé par son employeur
pour le préjudice d'anxiété personnellement subi. Cette jurisprudence
ne se limite pas au seul cas de l'amiante ; elle concerne
toute personne exposée à une substance nocive ou toxique31
.
Le Conseil d'État, pour sa part, a d'abord mentionné un préjudice
d'inquiétude de manière ponctuelle dans sa jurisprudence (pour
l'hépatite B et l'hépatite C) avant d'évoquer le « préjudice d'anxiété »
dans l'affaire du Mediator32
. En 2017, dans une jurisprudence précédemment
évoquée, il reconnaît le caractère indemnisable du préjudice
d'anxiété pour un ouvrier d'État exposé à l'amiante dans son
cadre professionnel, indiquant que l'anxiété est due au « risque
élevé de développer une pathologie grave, et par là même d'une
espérance de vie diminuée »33
. Plus précisément, le Conseil d'État
rappelle que les victimes de l'amiante doivent fournir des éléments
personnels et circonstanciés, alors même qu'elles ont bénéficié d'un
dispositif de cessation anticipée d'activité. Toutefois, il considère que
30. Cass. ass. plén., 5 avr. 2019, no
31. Cass. soc., 11 sept. 2019, no
18-17442.
17-24879, D. 2019., p. 2058, obs. BACACHE,GUÉGAN et PORCHYSIMON
; JCP 2019, no 1024, obs. BACACHE ; ibid.no 1173, obs. BLOC C. ; RTD civ. 2019, p. 873,
note JOURDAIN.En l'espèce, étaient concernés des mineurs de fond, employés par Charbonnages
de France. En outre, en 2021, la Cour de cassation opère un revirement à propos
de la prise en compte des normes nouvelles (et des revirements précisément) dans
une affaire relative au préjudice d'anxiété d'un travailleur de l'amiante : Cass. ass. plén.,
2 avr. 2021, no
19-18814.
32. CE, 9 nov. 2016, no
33. CE, 3 mars 2017, no
393108, AJDA 2017, p. 426, note BRIMO ; RDP 2017, p. 1581, note SILD ;
RDP 2017, p. 1581, note SILD ; RDSS 2016, p. 1162, obs. PEIGNÉ ; concl. LESSI disponibles sur
Arianeweb.
401395, AJDA 2017, p. 495. La cour administrative d'appel de Marseille
a indemnisé le préjudice d'anxiété pour une victime de l'amiante qui ne bénéficie pas de
l'allocation spécifique de cessation anticipée d'activité mais « qui justifie d'éléments probants
relatifs à sa situation personnelle et aux conditions d'exercice de sa profession de
nature à caractériser un risque d'exposition aux fibres d'amiante durant sa vie professionnelle
». CAA Marseille, 5 mars 2019, no
17MA04234 ; BARTOLUCCI M., « Le préjudice d'anxiété
en droit public », RFDA 2018, p. 153.
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