Hors collection - Finances publiques et justice sociale - 46

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LeS POLItIqueS PuBLIqueS eN queStION

I - UNE MONARCHIE SOCIALE
Le roi n'a pas cependant attendu son accession au trône pour faire
montre d'un intérêt tout aussi marqué pour les catégories défavorisées
de la population. La campagne de lutte contre la pauvreté, menée en
novembre 1998 avait été le point d'orgue de cette disposition d'esprit.
L'accueil quotidien réservé aux citoyens de base et à leurs doléances depuis
des années, en sa résidence de Salé, exprimait bien cette sensibilité. en
devenant roi, Mohammed VI, ne pouvait évidemment que donner la pleine
mesure à cette inclination de son cœur et en faire l'un des axes prioritaires
de sa politique. Il reste que la construction politique qui a été faite autour de
l'expression de « Roi des pauvres » reste me semble-t-il sujette à caution. Il
ne faut pas en effet qu'elle puisse faire croire que le roi n'est que social ; qu'il
va donc s'attacher pratiquement à ce seul domaine par des actions symboliques ou des signes forts ; et qu'en dernière instance il ne serait que cela.
Dans un tel schéma, il faut bien voir que le risque est réel de réduire
le statut royal à sa seule expression sociale en l'occurrence ; ce serait
une manière de corseter l'action royale et de la banaliser puisque son
déploiement sur le terrain resterait pratiquement comparable, de surcroît,
à des dizaines d'associations intervenant dans le même champ. « Roi des
pauvres », le souverain verrait donc peu ou prou le reste - tout le reste
- échapper à son champ de compétences. Il y a là, qu'on le veuille ou non,
un schéma de « domaine réservé » à rebours où le gouvernement, lui, aurait
donc pratiquement la haute main sur les grands dossiers nationaux ?
Rien n'est plus étranger à la philosophie politique et aux principes de
la monarchie marocaine que cette nouvelle articulation des pouvoirs et des
rôles que d'aucuns appellent de leurs vœux, de manière voilée et feutrée.
Faut-il en effet rappeler que le premier article de la Constitution marocaine - depuis celle de 1962 d'ailleurs - précise expressément que « le Maroc
est une monarchie constitutionnelle, démocratique et sociale » ? Le caractère social est donc bel et bien proclamé - et dans les toutes premières
dispositions de la loi suprême. Celles-ci traduisent la volonté de ne pas
limiter la nature de la monarchie à son articulation constitutionnelle et
démocratique mais à l'étendre au domaine social. elles évoquent ainsi plus
directement la sollicitude de la nation face à ceux de ses membres qui sont
les plus vulnérables ; pour réaliser une certaine justice sociale, la solidarité
nationale doit jouer. C'est-à-dire que par-delà la situation des pauvres, le
roi entend édifier une société plus juste, faisant une large place à l'égalité des
chances, où les couches défavorisées auront leur place entière. et leur dignité.
Dans cet esprit, la lutte contre la pauvreté prend à ses yeux une dimension prenant en charge tout un projet de société : elle participe en effet de
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