Grands colloques - Les langues régionales et la construction de l'État en Europe - 190

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L'OCCITAN À L'ÉCOLE

comme prioritaires demande des efforts. Des efforts de gestion : payer des
enseignants, les former, et, là où ils sont affectés dans les établissements
secondaires par exemple, trouver un créneau dans les emplois du temps
pour ce genre d'options. Sans parler du danger d'exacerber la concurrence
entre matières : chaque discipline constitue une niche, dans laquelle, selon
la formule fameuse s'appliquant d'ailleurs à autre chose, il y a un chien
qui aboie, dès qu'il sent que ses horaires peuvent être rognés ou ses élèves
potentiels détournés au profit de ces nouveaux venus que sont les professeurs d'occitan. La facilité, c'est de ne rien faire de trop vigoureux en faveur
des langues régionales, et de considérer que ce qui se fait déjà est bien
assez bon pour elles : c'est la substance des réponses faites aux questions
écrites de députés en faveur de l'occitan, réponses formulées en termes
voisins depuis au moins une quinzaine d'années, comme si les bureaux se
les transmettaient d'alternance politique en alternance politique14. Quant
à savoir quelle place l'occitan et les autres langues pourraient occuper dans
un projet éducatif global, au-delà des énoncés mécaniques sur la richesse
que constitue ce patrimoine ancestral etc., c'est quelque chose de trop
compliqué à penser. La routine et la paresse intellectuelle constituent un
obstacle au moins aussi important que le préjugé, le mépris ou la chasse aux
dépenses perçues comme inutiles. Notons au demeurant que bien souvent,
la revendication telle qu'elle est formulée par les associations, contraintes
de se colleter avec les problèmes concrets rencontrés sur le terrain par
leurs adhérents, a du mal à développer une réflexion sur ce que pourraient
être concrètement les apports de l'enseignement des langues régionales :
en dehors de la référence, justifiée, aux bienfaits cognitifs du bilinguisme
précoce, ce que l'on retrouve souvent dans un certain discours militant,
c'est la célébration autocentrée des mérites de la langue et de la culture
qu'on défend.
Au fond, malgré les progrès réalisés, qu'il ne faut ni surestimer ni
dénigrer, on a bien l'impression que somme toute il existe une vraie continuité entre le temps de l'école de Jules Ferry et notre temps. Aujourd'hui
comme alors, la société française se révèle incapable de penser sa pluralité
linguistique. Ceux qui la dirigent n'osent pas prononcer explicitement la
condamnation de l'occitan et des autres langues de France comme irrémédiablement liées à un passé révolu, et se sentent obligés de leur prodiguer
quelques soins. Mais ils ne sont pas capables de trouver le moyen (et les
moyens) pour que ces soins ne soient pas purement palliatifs. Et c'est ainsi
14. Le site de l'association professionnelle FELCO, Fédération des enseignants de langue
et culture d'oc (du public) www.FELCO-CREO.org, tient une comptabilité rigoureuse de
ces interventions et des réponses qu'elles obtiennent, comme des débats à l'Assemblée ou
au Sénat, ou des courriers adressés au ministère sur les réformes successives et leur impact
sur l'enseignement de l'occitan.
http://www.FELCO-CREO.org
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