L'expert - Le statut des baux commerciaux - 1re - 209

TEXTE DU CODE
DE COMMERCE
Article L. 145-38 (suite)

ANNOTATIONS ET JURISPRUDENCE
Il y a une nécessaire corrélation entre le sens de la variation des facteurs locaux
de commercialité et le sens de la variation de la valeur locative, puisque la
seconde doit résulter de la première (le texte précise : « par elle-même »).
En revanche, il n'y a pas de corrélation entre le sens de la variation de la valeur
locative et le sens de la variation des indices du coût de la construction (Cass.
3e civ., 16 déc. 1998, Gaz. Pal. Rec. 1999, 2, p. 449, note P.-H. Brault).

Fixation
à la hausse
ou à la baisse

L'action en fixation du loyer révisé, à la valeur locative, sur ce fondement, est
ouverte non seulement au propriétaire, qui veut obtenir un déplafonnement et
une augmentation de loyer, mais aussi au locataire, qui veut obtenir une baisse
de loyer (CA Paris, 27 nov. 2002, Gaz. Pal., 13-14 juin 2003, som. p. 33). Avant
la réforme du 11 décembre 2001 (loi MURCEF : voir infra le cas de la valeur
locative inférieure au plafond), l'action du locataire sur le fondement d'une
modification matérielle de la commercialité n'était guère étudiée, puisque
la fixation à la baisse était de droit. Mais, depuis la réforme, comme le loyer
contractuel constitue désormais un plancher, le locataire qui veut faire réduire
son loyer est tenu de prouver la modification matérielle des facteurs locaux de
commercialité, la baisse de plus de 10 % de la valeur locative, et la relation de
cause à effet entre les deux. Une modification matérielle de la commercialité à
la hausse peut d'ailleurs entraîner une fixation à la baisse, si la valeur locative,
bien qu'améliorée, reste inférieure au loyer contractuel (Cass. 3e civ., 24 mai
2017, n° 16-15043, Gaz. Pal., 11 juill. 2017, p. 63, note J.-D. Barbier).

Période
d'appréciation de
la modification

La modification alléguée doit être intervenue depuis la dernière fixation
amiable ou judiciaire (CA Paris, 8 déc. 1970, AJPI 1971, p. 438 - CA Paris,
21 déc. 1970, Gaz. Pal. Rec. 1971, 1, som., p. 48). Ainsi, pour la première
révision, la période à considérer est celle comprise entre la date de prise d'effet
du bail et celle de la demande de révision (Cass. civ., 14 mai 1980, Gaz. Pal.
Rec. 1980, 2, som., p. 424).
C'est à la partie qui l'invoque d'apporter la preuve de la modification alléguée, et le juge peut refuser toute expertise (Cass. 3e civ., 22 janv. 1997,
n° 94-21352, Gaz. Pal. Rec. 1997, 2, som., p. 387, note J.-D. Barbier).

A - MODIFICATION MATÉRIELLE
DES FACTEURS LOCAUX DE COMMERCIALITÉ
Modification
matérielle

Les facteurs locaux de commercialité sont définis à l'article R. 145-6 du Code
de commerce. Alors que, pour déplafonner en renouvellement, il faut une
modification « notable », en révision, la modification doit être « matérielle ».
Selon Derruppé, Brière de l'Isle, Lafarge et Maus, « la modification invoquée
doit être matérielle, bien que l'on ne discerne pas les motifs de cette exigence.
Cela impose d'écarter les modifications non matérielles, tel que l'abandon
d'un projet de travaux, l'accroissement du trafic d'une aérogare, ou même la
simple augmentation quantitative de facteurs anciens » (« Baux commerciaux »,
D. 1979, p. 387). Dans sa thèse, Mme Marie-Pierre Bagnéris observe que la
« notion de changement concret semble bien éclairer l'interprétation à donner
de l'exigence légale de matérialité de la modification. C'est ainsi que l'augmentation des facteurs locaux de commercialité, par exemple l'augmentation
de la clientèle d'un quartier, ne pourra entraîner le déplafonnement du loyer
révisé que si elle est la conséquence directe de modifications tangibles ayant
touché ce secteur. La jurisprudence a ainsi pu décider qu'il ne pouvait s'agir
de simples projets de construction non encore réalisées » (Les modifications du
loyer du bail commercial, thèse Toulouse, 1995). La modification matérielle
devrait donc s'entendre d'une modification concrète, tangible, par opposition
à un simple projet non encore réalisé. Selon d'autres auteurs, il n'y aurait pas
de différence entre une modification notable et une modification matérielle
(Robine et Vaz da Cruz, Gaz. Pal. Rec. 1998, 1, doct., p. 451). D'autres enfin
relèvent qu'est matériel « tout ce qui se touche et a corps et forme ». Aussi, ne
seraient pas des modifications matérielles l'abandon d'un projet de travaux,
l'annonce de l'ouverture d'un grand magasin, un engouement ou un effet de
mode, un projet de rénovation (F. Maigné-Gaborit et J.-D. Barbier, « La révision
triennale du loyer du bail commercial à la hausse », Gaz. Pal. Rec. 2000, doct.,
p. 1811 ; J.-D. Barbier, « Les facteurs locaux de commercialité : variation en
hausse ou en baisse », Loyers et copr., nov. 2000, étude 6 ; J.-P. Mignot, « Le
Diable à la Madeleine », Gaz. Pal. Rec. 2003, doct., p. 1573).

Code de commerce. Première partie : Législative · 209 

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