L'expert - Le statut des baux commerciaux - 1re - 219

TEXTE DU CODE
DE COMMERCE
Article L. 145-39 (suite)

Décalage lors du
renouvellement
ou lors d'une
révision -
Adaptation
par le juge

ANNOTATIONS ET JURISPRUDENCE
Dans son rapport annuel pour 2018, la Cour de cassation invite à rechercher
s'il est possible « d'opérer une division à l'intérieur » de la clause litigieuse,
laquelle doit s'entendre comme « un ensemble comportant des aspects multiples, certains relevant de l'énonciation d'un principe (...), les autres relevant de l'organisation de modalités de calcul ou d'application » (Rapport
annuel 2018, Livre 3, III, D, 1).
Par ailleurs, une difficulté peut survenir lorsque le renouvellement du bail
intervient à une date différente de celle de l'indexation contractuelle. Ainsi,
par exemple, si un bail a été conclu à effet du 1er janvier, avec une indexation
annuelle au 1er janvier de chaque année, et s'il fait l'objet d'un renouvellement
en cours de tacite prolongation, par exemple, le 1er juillet, la clause d'indexation deviendrait de fait inapplicable puisque, si l'on fait jouer l'indexation au
1er janvier, on ne respecte pas la périodicité annuelle prévue par la clause,
et si l'on fait jouer l'indexation un an plus tard, on ne respecte pas la date
du 1er janvier contractuellement prévue. Dans ce cas, la Cour de cassation
a jugé que la clause d'indexation restait néanmoins valable puisque « la
distorsion retenue ne résultait pas de la clause d'indexation elle-même, mais
du décalage entre la date du renouvellement et la date prévue pour l'indexation » (Cass. 3e civ., 13 sept. 2018, n° 17-19525, Gaz. Pal., 20 nov. 2018,
p. 67, note J.-D. Barbier ; Loyers et copr. 2018, n° 226, note P.-H. Brault).
Il appartient au juge d'adapter la clause d'indexation. Cela a également été
jugé suite à un décalage résultant d'une révision légale, le juge devant alors
adapter la clause d'indexation à la date de prise d'effet du nouveau prix
(Cass. 3e civ., 17 mai 2018, n° 17-15146, Administrer, juin 2018, p. 31, note
J.-D. Barbier, Loyers et copr. 2018, n° 177, note P.-H. Brault - CA Versailles,
12e ch., 13 sept. 2016, n° 15/00657, Gaz. Pal., 14 mars 2017, pan., p. 84,
note S. Chastagnier).

Article L.  145-40  - Les loyers
payés d'avance, sous quelque
forme que ce soit, et même à
titre de garantie, portent intérêt
au profit du locataire, au taux
pratiqué par la Banque de France
pour les avances sur titres, pour
les sommes excédant celle qui
correspond au prix du loyer de
plus de deux termes.

Ordre public
et prescription

Le loyer peut être librement fixé par les parties lors de la conclusion du bail
initial ou même en révision ou en renouvellement (cf. articles L. 145-38 et
L. 145-34) et les parties demeurent libres de fixer les modalités de règlement
de ce loyer, tandis que le Code de commerce ne prévoit pas de disposition
particulière concernant le dépôt de garantie destiné à assurer la parfaite
exécution du contrat.
Une limite à cette liberté est cependant posée pour les loyers payés d'avance,
en principe non productifs d'intérêts, aux termes d'une disposition d'ordre
public qui sanctionne tout versement excédant deux termes de loyer, par
l'obligation de verser un intérêt « au taux pratiqué par la Banque de France
pour les avances sur titres (...) » (C.-E. Brault, « Les garanties du bailleur au
regard des dispositions d'ordre public », Gaz. Pal., 28 sept. 2012, p. 14 ; A.
d'Argenlieu, « Bailleur commercial, dépôt de garantie et intérêt annuel », Gaz.
Pal. Rec. 2004, doct. p. 2900).
Toute clause contraire stipulant que les sommes versées ne seraient pas productives d'intérêts s'avère nulle au visa des dispositions de l'article L. 145-15
(Cass. 3e civ., 6 mai 1985, n° 83-11840, Bull. civ. III, n°  78 ; JCP N 1985, I,
p. 249 - CA Versailles, 4 juin 1992, Administrer, mai 1993, p. 53), et ces
dispositions s'appliquent dans le cadre de la soumission conventionnelle d'un
bail au statut des baux commerciaux (Cass. 3e civ., 17 mai 2002, n° 00-11664,
Loyers et copr. 2002, comm. 174, note P.-H. Brault ; AJDI 2002, p. 525, note
J.-P. Blatter).
Depuis la réforme du 18 juin 2014, le régime de la nullité a été remplacé par
celui du « réputé non écrit », et toute clause contraire est donc désormais réputée non écrite. L'action en annulation de la clause qui devait être exercée dans
le délai de deux ans à compter de la signature du bail (Cass. 3e civ., 3 févr.
2010, n° 08-21333, Gaz. Pal., 17 juill. 2010, p. 41, note J.-D. Barbier) n'est
plus soumise à prescription lorsque le locataire invoque l'illicéité de la clause
contraire à l'ordre public statutaire (voir observations sous l'article L. 145-60).
L'action en paiement des intérêts pour les sommes excédant deux termes se
trouve soumise au délai de prescription de deux ans prévu par l'article L. 14560 du Code de commerce (CA Paris, 3 mars 2004, n° 02/09591 - CA Paris,
31 janv. 2018, n° 14/06872 - CA Paris, 26 juin 2019, n° 19/00907).

Code de commerce. Première partie : Législative · 219 

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