L'expert - Le statut des baux commerciaux - 1re - 321

TEXTE DU CODE
DE COMMERCE
Article R. 145-8 (suite)

Charges
exorbitantes

ANNOTATIONS ET JURISPRUDENCE
Des restrictions aux modes d'exploitation normaux, telle une interdiction de
mise en location-gérance, devraient constituer un facteur de diminution de la
valeur locative.
Constituent également un facteur de diminution de la valeur locative, les
obligations dont le bailleur s'est déchargé sur le locataire, sans contrepartie.
Le texte vise les obligations incombant « normalement » au bailleur. Cet
adverbe renvoie à la norme légale, ainsi que cela a été jugé pour la taxe foncière (CA Paris, 5 oct. 1995, Loyers et copr. 1995, n° 530 - CA Paris, 16 juin
2004, AJDI, sept. 2004, p. 638 - CA Paris, 5-3, 30 nov. 2011, n° 10-05085).
Ainsi, lorsque le bail fait peser sur le preneur des charges exorbitantes, la
jurisprudence procède classiquement à des abattements forfaitaires de 2 à
15 % sur la valeur locative pour tenir compte globalement des charges exorbitantes (CA Paris, 26 oct. 2001, AJDI, févr. 2003, p. 148 - CA Paris, 11 janv.
2002, AJDI, févr. 2003, p. 150 - CA Paris, 8 févr. 2002, AJDI, févr. 2003,
p. 151 - TGI Paris, 5 déc. 2002, AJDI, janv. 2003, p. 68 - TGI Nanterre,
13 août 2009, AJDI, févr. 2011, p. 165 - CA Aix-en-Provence, 20 janv. 2011,
AJDI, sept. 2011, p. 657 - CA Paris, 28 oct. 2016, n° 14/16938 (2 %) - CA
Paris, 20 déc. 2007, n° 07/02459 (10 %) - CA Aix-en-Provence, 13 nov. 2008,
n° 07/16221 (10 %) - CA Paris, 20 janv. 2017, n° 14/21027 (10 %) pour taxe
foncière, travaux de l'article 606 du Code civil, travaux de mise en conformité,
frais de gardiennage, honoraires de gestion...).

Travaux de mise
en conformité

Tel est le cas, lorsque le bail met à la charge du locataire les travaux de mise
aux normes ou de mise en conformité des locaux, puisque de tels travaux
relèvent en principe de l'obligation de délivrance du bailleur ou de la force
majeure qui, selon l'article 1755 du Code civil, ne sont pas normalement à la
charge du locataire.

Vétusté

Si le bail met à la charge du preneur les travaux et réparations rendus nécessaires par la vétusté, qui est par nature à la charge du bailleur, conformément à l'article 1755 du Code civil, la valeur locative peut faire l'objet d'un
abattement.

Ravalement

La charge du ravalement de l'immeuble présente également un caractère
exorbitant. Si le ravalement doit être remboursé ou exécuté par le preneur, la
valeur locative doit être diminuée.

Assurance

Certains baux obligent le preneur, non seulement à être assuré lui-même,
mais à rembourser au propriétaire sa propre assurance. Il s'agit d'une charge
exorbitante de nature à diminuer la valeur locative.

Pondération
contractuelle

Une clause fixant contractuellement la pondération des locaux n'est pas une
clause exorbitante imposant une obligation au locataire pouvant entraîner une
minoration de la valeur locative (Cass. 3e civ., 9 avr. 2013, n° 12-15002, Gaz.
Pal., 2-3 août 2013, p. 36, note J.-D. Barbier ; Loyers et copr. 2013, n° 180).

Gros travaux

Avant la réforme dite Pinel (loi du 18 juin 2014 et décret du 3 novembre 2014),
les gros travaux définis à l'article 606 du Code civil étaient parfois mis à la
charge du preneur, par une clause contractuelle. Une telle clause justifiait un
abattement. Depuis la réforme Pinel, une telle clause est réputée non écrite
et il n'y a plus lieu de procéder à un abattement au titre des gros travaux de
l'article 606 du Code civil. Toutefois, l'article R. 145-35 permet toujours de
transférer à la charge du locataire les grosses réparations définies à l'article 606
du Code civil lorsqu'elles se rapportent « à des travaux d'embellissement dont
le montant excède le coût du remplacement à l'identique ». Un abattement est
donc toujours justifié de ce chef.
Concernant la notion de charges exorbitantes, l'article R. 145-35 interdit de
transférer au preneur certains travaux ou certaines taxes, ce qui ne signifie pas
que les travaux et taxes qui restent transférables par une clause particulière
soient devenus normaux ou aient perdu leur caractère de charges exorbitantes.
La notion de charges « incombant normalement au bailleur » n'a pas été remise
en cause par la loi Pinel et son décret d'application (cf. Rép. min. n° 3675,
JOAN Q, 6 mars 2018, p. 1907 ; AJDI 2018, p. 326).

Code de commerce. Deuxième partie : Réglementaire · 321 

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