Hors collection - Sources et ressources de l’interprétation juridique - 169

L'INTENTION
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l'article 31 de la Convention de Vienne. Comme nous l'avons vu plus haut (264),
l'article 31 ne confère pas à l'interprète le droit d'écarter un texte clair au nom de
l'objectif poursuivi par celui-ci ; l'interprétation téléologique reste une méthode
secondaire susceptible d'éclairer la signification du texte lorsque celui-ci peut
être lu de plusieurs façons ; elle doit toutefois être écartée lorsque le texte est
clair. Par contraste, l'article 29 § 9 permet à l'administration fiscale d'écarter l'application
d'un texte clair, lorsque certaines conditions spécifiques sont réunies,
dès l'instant qu'un objectif principalement fiscal a été poursuivi par le contribuable
et qu'il a été fait du texte une utilisation contraire à son objectif. Il nous
semble donc que l'article 29 § 9 offre aux autorités fiscales un moyen plus puissant
d'écartement du traité que la seule interprétation téléologique « ordinaire »
du traité (celle de l'article 31 de la Convention de Vienne), mais à la condition
que soient respectées les conditions prévues par l'article 29 § 9 (265).
212. Quant à l'autonomie de l'article 29 § 9 par rapport à la théorie interne de
l'abus de droit, elle nous paraît révélée par la rédaction différente du modèle et
des textes internes ainsi que par la place de l'interprétation téléologique dans la
dialectique de la preuve. Comme on le sait, le droit interne prévoit que c'est à
l'administration d'établir l'existence de l'abus de droit. C'est donc à elle de
démontrer que les objectifs des auteurs des textes n'ont pas été respectés par le
contribuable auquel un abus est reproché. L'article 29 § 9 procède différemment
puisqu'il commence par poser le principe de l'écartement de l'avantage conventionnel
en présence d'un montage principalement fiscal, « à moins qu'il soit établi
que l'octroi de cet avantage dans ces circonstances serait conforme à l'objet et
au but des dispositions pertinentes de cette Convention fiscale couverte ». La portée
de cette technique rédactionnelle (le « à moins que » suggérant que la charge
de la preuve repose sur le contribuable) ne nous paraît pas nulle. Elle est d'ailleurs
confirmée par le commentaire figurant au paragraphe 170 du commentaire
OCDE sur l'article 29 du modèle, selon lequel « les dispositions du paragraphe 9
ont pour effet de permettre de refuser un avantage conféré par une convention
fiscale lorsqu'un des principaux objets d'un montage ou d'une transaction est
l'octroi d'un avantage prévu par la Convention. En pareil cas cependant, la dernière
partie du paragraphe offre à la personne à laquelle le bénéfice de l'avantage
serait par ailleurs refusé (266) la possibilité d'établir que l'octroi de l'avantage,
dans ces circonstances, serait conforme à l'objet et au but des dispositions
pertinentes de la Convention ».
En conclusion, si la recherche de l'objet et du but de la convention fiscale
s'opère vraisemblablement de la même manière (c'est-à-dire au moyen des
mêmes outils de pensée et des mêmes éléments d'information sur l'origine et la
264. Cf. supra, nº 190.
265. Nous comprenons que telle est également la position de R. Danon, « The PPT in Post-BEPS Tax Treaty
Law: It Is a GAAR but Just a GAAR! », Bull.for international taxation, April/May 2020, p. 242 et s. Également
en ce sens, W. Schön, « The Role of " Commercial Reasons " and " Economic Reality " in the Principle Purpose
Test under Article 29(9) of the 2017 OECD Model », in P. Pasquale (éd.), Building Global International Tax
Law. Essays in Honour ofGuglielmo Maisto, IBFD, 2022, p. 243 et s., spec. pp. 252-254.
266. Souligné par nous.

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