Systèmes - La Convention européenne des droits de l'homme - 3e - 175

Article 11 - Liberté de réunion et d'association

« restrictions légitimes » à la liberté d'association des membres de ses forces
armées, de sa police ou de son administration. Ceci implique - dans la mesure où
lesdits corps de fonctionnaires sont concernés - que l'article 11 s'appliquera de
manière distincte de l'article 10. Ici, la marge d'appréciation laissée aux États est
ample, la Cour validant des interdictions faites aux membres des forces armées
et/ou des fonctionnaires de s'affilier à des partis politiques, soit au regard de
considérations d'ordre historique (CEDH, 20 mars 1999, Rekvényi c/ Hongrie), soit
plus fondamentalement pour des raisons tenant à l'importance de leur neutralité
(CEDH, 10 avril 2012, Trzelecku c/ Pologne).
Un courant très net voit toutefois le jour qui a pour objet de desserrer l'étau
des interdictions à l'endroit des membres des forces armées. À cet égard, l'Hexagone a vu tout son rapport à la « chose militaire » bouleversé tout à la fois par
une décision du Conseil constitutionnel, qui jugea contraire à la Constitution les
dispositions du Code électoral prévoyant que les fonctions de militaire de carrière
étaient incompatibles avec l'exercice d'un mandat électif local (décision 2014432 QPC du 28 novembre 2014, M. Dominique de L) et deux décisions de la Cour
de Strasbourg (CEDH, 2 octobre 2014, Matelly c/ France ; CEDH, 2 octobre 2014,
Adefdromil c/ France). Cette dernière, saisie par un militaire d'un côté (M. Matelly)
et une association de l'autre (Adefdromil), jugea à l'unanimité dans ces affaires
« jumelles » que « si la liberté d'association des militaires peut faire l'objet de
restrictions légitimes, l'interdiction pure et simple de constituer un syndicat ou
d'y adhérer porte à l'essence même de cette liberté une atteinte prohibée par la
Convention ». La Cour européenne rappela tout d'abord que si le § 2 de l'article 11
reconnaît l'existence de « restrictions légitimes » à l'égard de certains groupes,
« aucune catégorie professionnelle » n'est exclue de la « portée de l'article 11 »
(§ 42) ; autrement dit, l'interprétation de ces restrictions légitimes appelle une
approche restrictive et ne doit en aucun cas affecter « l'essence même du droit de
s'organiser ». Il reste à savoir désormais quand, comment et jusqu'où les autorités
françaises vont aménager de nouvelles règles afin que la liberté d'association
puisse exister dans les rangs des forces armées, tout en ne mettant pas à mal
les impératifs liés à la discipline militaire. Vaste et délicat chantier.

B. Des obligations conséquentes
Si les États ne doivent entraver d'aucune façon la liberté de réunion et d'association (obligation de ne pas agir), c'est surtout sur le plan des obligations positives
que la jurisprudence est exemplaire. Une affaire suffira à le démontrer. Quand le
maire de Moscou interdit de façon répétitive (de 2006 à 2008) la « Pride March »
(organisée par des homosexuels « engagés » afin de sensibiliser la population à
l'endroit des discriminations dont ils font l'objet en appelant à plus de tolérance
et de respect des droits de l'homme), le couperet européen est sans appel. À
l'unanimité, la Cour considéra qu'il y avait tout à la fois une violation de la liberté
d'association (article 11), du droit au recours effectif (article 13) ainsi que de l'article 14 combiné avec l'article 11 (CEDH, 21 octobre 2010, Alekseyev c/ Russie). Sur
la base de l'article 11, la Cour raisonna en deux temps. Elle réfuta tout d'abord

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