Systèmes - La Convention européenne des droits de l'homme - 3e - 203

Article 1 - Interdiction générale de la discrimination (Protocole n° 12)

un « but légitime » et doivent mettre en place « un rapport raisonnable de proportionnalité entre les moyens employés et le but visé » pour être conventionnelles
(CEDH, 28 mars 1985, Abdulaziz, Cabales et Balkandali et autres c/ Royaume-Uni,
§ 72). Sur la base de cette approche, la Cour a été en mesure de combattre les
phénomènes discriminants touchant notamment les personnes et/ou les groupes
dits « vulnérables ». Toutes les personnes subissant de façon récurrente (pour
ne pas dire structurelle) des traitements discriminatoires sur la base de motifs
tenant à leur nationalité (les étrangers), à leur sexe (les femmes en général et
les hommes en particulier), à leur orientation sexuelle (les homosexuels), à leur
origine filiale ou encore à leur origine ethnique et leur spécificité culturelle (les
Roms notamment), bénéficient de la protection de la Convention. Mobilisée aux
côtés du principe de non-discrimination, la vulnérabilité a plusieurs fonctions,
dont la plus visible est d'imposer des obligations positives spéciales à la charge
des États (obligations procédurales comme matérielles, de prévention comme
de réaction).
Ces dernières années, la Cour a fait évoluer sa jurisprudence, tout en étant
attentive à ne pas dépasser la ligne jaune, i.e. celle du « consensus européen »
et/ou de la « communauté de vue dans les sociétés modernes » pour reprendre le
désormais célèbre dictum de l'arrêt Demir et Baykara (CEDH, Gde Ch., 12 novembre
2008, Demir et Baykara c/ Turquie, § 86). Partant, sur des questions où le consensus
fait défaut, elle joue à fond sur l'ample marge d'appréciation des États.

A. Les discriminations fondées
sur la nationalité
La jurisprudence de la Cour démontre son hostilité à l'égard des différences de
traitements fondées, en matière d'attribution de prestations sociales, sur le critère
de la nationalité. C'est l'arrêt Gaygusuz qui donna le « la » en la matière : il concernait une discrimination fondée sur la nationalité dans le cadre de l'attribution
d'une allocation de chômage (CEDH, 16 septembre 1996, Gaygusuz c/ Autriche).
Sur le fondement de l'article 14 combiné avec l'article 8, les affaires Fawsie et
Saidoun confirment cet état de fait (CEDH, 28 octobre 2010, Fawsie c/ Grèce ; CEDH,
28 octobre 2010, Saidoun c/ Grèce). Les requérantes étaient de nationalité syrienne
et libanaise et bénéficiaient en Grèce, depuis 1998, du statut de réfugié politique, à
l'instar de leurs enfants. Elles se sont vues refuser en 2005 l'attribution de l'allocation pour famille nombreuse au motif que ni elles, ni leurs enfants, n'avaient
la nationalité grecque ou la nationalité d'un des États membres de l'Union européenne. Dans les deux affaires, les requérantes soutenaient que le refus des autorités grecques de leur attribuer l'allocation pour famille nombreuse avait entraîné
une discrimination fondée sur la nationalité contraire à l'article 14 combiné à
l'article 8. La Cour a sanctionné à l'unanimité le refus de l'administration grecque.
Et de rappeler sa jurisprudence traditionnelle selon laquelle « seules des considérations très fortes peuvent l'amener à estimer compatible avec la Convention
une différence de traitement exclusivement fondée sur la nationalité (§ 35). »

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