Systèmes - La Convention européenne des droits de l'homme - 3e - 234

La Convention européenne des droits de l'homme

Paris sur la base de l'important article 24 bis de la loi de 1881, tel qu'issue de la
loi Gayssot de 1990. Par sa décision unanime d'irrecevabilité, la Cour européenne
a empêché Roger Garaudy d'abuser de son droit à la liberté d'expression. En
considérant que l'auteur avait remis « en cause la réalité, l'ampleur et la gravité
[.../...] de faits historiques qui ne font pourtant pas l'objet de débats entre historiens. » tels l'Holocauste ou encore le procès de Nuremberg, le requérant avait
fait « siennes » les thèses négationnistes. Et la Cour de marteler que la « négation
et/ou la révision de faits historiques incontestables sont « incompatibles avec la
démocratie et les droits de l'homme » et que cela va « à l'encontre des valeurs
fondamentales de la Convention, telle que les exprime son Préambule, à savoir
la justice et la paix. »
Si l'affaire Garaudy donna son plein effet à l'article 17, la Cour n'entend pas
l'utiliser facilement. En effet, le but général de cette disposition étant d'empêcher que des individus ou des groupements totalitaires puissent exploiter en leur
faveur les principes posés par la Convention (CEDH, déc., 2 septembre 2004, W.P.
et autres c/ Pologne ; CEDH, déc., 16 novembre 2004, Norwood c/ Royaume-Uni),
la Cour n'applique l'article 17 qu'à titre exceptionnel et dans des hypothèses
extrêmes. Elle trouve d'ailleurs souvent des moyens détournés pour déclarer
irrecevables des requêtes s'inscrivant dans une problématique similaire. Ainsi,
quand le vice-président du Front national à Lyon, député européen et professeur
à l'Université Lyon III mentionne de façon particulièrement ambiguë l'existence
des chambres à gaz - en considérant que « c'est aux historiens d'en discuter »
- la Cour refuse de donner droit au requérant - qui se plaignait d'une atteinte
à sa liberté d'expression - en déclarant sa requête irrecevable sur la base de
l'article 35 comme étant « manifestement mal fondée », écartant la question sous
l'angle de l'article 17 (CEDH, déc. 7 juin 2011, Gollnish c/ France).
Ceci dit, la Cour a toutefois peu à peu cerné les contours de l'article 17. Ainsi,
les décisions Norwood (précitée) et Pavel Ivanov c/ Russie (CEDH, déc., 20 février
2007), lui ont donné l'occasion d'affirmer que l'usage de la liberté d'expression
dans des buts respectivement islamophobe et antisémite était contraire aux
valeurs de la Convention. Dans l'arrêt Orban et al. c/ France du 15 janvier 2005, elle
a souligné que des propos ayant sans équivoque pour but de justifier des crimes
de guerre - tels que la torture ou des exécutions sommaires - sont pareillement
caractéristiques d'un détournement de l'article 10 de sa vocation. Il en est de
même pour les « expressions visant à propager, inciter ou à justifier la haine
fondée sur l'intolérance religieuse » (CEDH, 4 décembre 2003, Gündüz c/ Turquie).
Dans le même sens, la Cour a jugé que l'article 17 de la Convention empêchait
les fondateurs d'une association dont l'objet statutaire avait des connotations antisémites, de se prévaloir du droit à la liberté d'association consacré par l'article 11
de la Convention pour contester l'interdiction de celle-ci, retenant en particulier
que les intéressés cherchaient essentiellement à utiliser cette disposition pour
fonder sur la Convention un droit de se livrer à des activités contraires à la lettre et
à son esprit (CEDH, déc., 2 septembre 2004, W.P. et autres c/ Pologne). A contrario,
un requérant qui se fonde sur l'article 3 du protocole n° 1 pour contester l'inéligibilité dont il est frappé et obtenir de la Cour un arrêt dont l'exécution au plan interne

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