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Les comptes publics : objets et limites

difficulté structurelle. Il n'existe pas d'entité correspondant à l'ensemble du
système de sécurité sociale. L'imputation des moyens et des résultats ne
pose généralement pas de difficultés pour les entités publiques. Elles ont
été « créées » à un moment donné et dotées alors d'un statut juridique qui
permet de dresser la liste de leurs droits et obligations, même si cela est
parfois difficile en pratique. Dans le cas de l'État, le comptable fait face à
une double difficulté.
La première difficulté consiste à déterminer ce qu'est l'État : de qui faiton les comptes ? Cette question est préalable au fait même de tenir des
comptes. La définition de l'État est fonction des approches choisies. La
sociologie, l'économie, la science politique, l'histoire, l'anthropologie, etc.
fournissent des réponses diverses. La comptabilité s'appuie plus volontiers
sur le droit pour dresser les concours de l'État dont elle doit tenir les
comptes. Pour les constitutionnalistes1, l'État est un être politique abstrait
qui ne peut exercer par lui-même le pouvoir dont il est investi. Ce pouvoir
est exercé par des entités qui sont généralement désignées comme étant
ses organes. Ces derniers sont mentionnés dans la Constitution alors que
l'État n'y est pas défini. Il est délicat pour le comptable de proposer les
comptes d'une entité abstraite ou d'entités politiques. Mais, étant doté de
la personnalité juridique, l'État dispose d'un patrimoine. Il devient alors loisible d'accepter qu'il s'agit de cette entité dont on fera les comptes. On
dresse donc les comptes de la personne morale de droit public et non les
comptes de l'entité politique.
La seconde difficulté consiste à déterminer l'étendue des droits et obligations de l'État : de quoi fait-on les comptes ? L'État, souverain par définition, joue un rôle très important dans l'architecture des pouvoirs publics : il
organise politiquement les droits et obligations des citoyens. L'État dispose
aussi d'une place centrale dans le pilotage, le contrôle et la responsabilité
des finances publiques. Les modalités d'exercice de ces différentes fonctions rendent la notion d'État difficile à appréhender pour un comptable.
En quel sens doit-on l'entendre lorsqu'on tient « ses » comptes ?
La question qui se pose au comptable est alors de savoir si cet État, qui
dispose d'un patrimoine, est le même que celui qui exerce le pouvoir et la
souveraineté et qui dispose de la « compétence de la compétence ». Il s'agit
sans doute d'un débat de philosophie politique qui dépasse largement le
cadre de la comptabilité, mais qui doit cependant être tranché à ce niveau
pour savoir de qui on fait les comptes lorsqu'on établit ceux de l'État. C'est
en ce sens que le cadre conceptuel des comptes publics2 distingue « le pouvoir souverain » de l'entité juridique État dont il propose la normalisation des
comptes. Le même type de distinction est inscrit dans le cadre conceptuel

1. Olivier BEAUD, La puissance de l'État, PUF, Léviathan, 1994, 512 p.
2. CNCOP, Cadre conceptuel des comptes publics relevant de la comptabilité d'exercice, avis
nº 2016-02, 4 juill. 2016, 62 p.

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