Bibliothèque constitutionnelle et de science politique - Tome 152 - La responsabilité de l'État du fait des lois déclarées contraires à la Constitution - 400

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LA RESPONSABILITÉ DE L'ÉTAT DU FAIT DES LOIS 
DÉCLARÉES CONTRAIRES À LA CONSTITUTION

Pourtant, il faut reconnaître qu'aucun des textes à valeur constitutionnelle ne
contient de dispositions prévoyant expressément, à l'inverse de la Pologne par
exemple188, que l'État doit répondre des fautes commises par ses organes ou,
qu'une personne privée189 a l'obligation de réparer les conséquences dommageables de ses fautes190.
817. L'article 15 de la Déclaration de 1789, suivant lequel « La Société a le
droit de demander compte à tout Agent public de son administration », a pu être
retenu pour justifier la responsabilité de la puissance publique. Néanmoins, ce
lien est resté lettre morte dans la jurisprudence191 jusqu'à une date récente192. C'est
principalement l'article 13 de cette même Déclaration193 qui était invoqué par les
auteurs administrativistes pour justifier le développement de la responsabilité de
la puissance publique. Ce courant de pensée semble aujourd'hui s'estomper
progressivement dans la continuité de la thèse du Professeur P. Delvolvé qui expliquait que, retenir l'article 13 de la Déclaration comme fondement de la responsabilité conduit à distordre cette disposition194. Surtout, la rupture d'égalité devant
188. Sur l'engagement de la responsabilité de la puissance publique en Pologne qu'il soit permis
de renvoyer à, KRZYSZTOF W., « La responsabilité de l'administration publique et la constitution
polonaise », RFAP, n°  147, 2013, p.  639. Voir également POPELIER P., et ROGULA C., « La
responsabilité extracontractuelle du fait de légiférer, perspectives de droit comparé », in La
responsabilité des pouvoirs publics, XXIIes Journées d'études juridiques Jean Dabin, D. Renders (dir.),
Bruylant, 2016, p. 435. Ces écrits étudient le lien entre l'article 77.1 de la Constitution de Pologne, qui
prévoit que « chacun a le droit d'être indemnisé pour le préjudice subi des suites de l'action irrégulière
d'un organisme d'autorité publique » et la responsabilité de l'État-législateur.
189. Les auteurs qui étudient la place du droit constitutionnel dans les sources de la responsabilité
privée identifient également ce silence des textes constitutionnels sur le droit de la responsabilité, voir
par exemple MOLFESSIS N., Le Conseil constitutionnel et le droit privé, LGDJ, Bibl. dr. priv., Tome
287, 1997, pp. 293-294.
190. Le Professeur J. Moreau a, récemment, proposé d'intégrer dans la Constitution le droit à
réparation des victimes, MOREAU J., « Le droit à réparation des dommages », in J.-J. Bienvenu,
J. Petit, B. Plessix et B. Seiller (dir), La Constitution administrative de la France, Dalloz, coll. « Thèmes
et commentaires », 2012, p. 333.
191. La doctrine a souligné l'« inaptitude radicale à jouer le rôle de source constitutionnelle des
régimes de responsabilité de la puissance publique » de l'article  15 de la Déclaration de 1789,
LATOURNERIE M.-A., « Responsabilité publique et Constitution », in Mélanges René Chapus,
Montchrestien, 1992, p.  353. Dans le même, sens la Professeure A. Jacquemet-Gauché estime que
« l'article 15 de la Déclaration de 1789 n'a pas connu la postérité à laquelle il aurait pu prétendre, alors
même qu'il annonce la responsabilité du fonctionnaire », JACQUEMET-GAUCHÉ A., La responsabilité
de la puissance publique en France et en Allemagne. Étude de droit comparé, LGDJ, Bibl. dr. pub., Tome
275, 2013, p. 65. Pour un avis contraire, voir RENOUX T.-S. et de VILLERS M., Code constitutionnel,
Litec, coll. « Code bleu », 3e éd., 2004, pp. 178-179.
192. Par une décision du 15 septembre 2017 (Cons. const., n° 2017-655 QPC du 15 sept. 2017,
M.  François G. [Accès aux archives publiques émanant du Président de la République, du Premier
ministre et des autres membres du Gouvernement]), le Conseil constitutionnel a fait une première
utilisation de l'article 15 de la Déclaration de 1789 à propos des archives publiques. Sur cette question,
qu'il soit permis de renvoyer à VERPEAUX M., « Première utilisation effective de l'article  15 de la
Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789 », note sous Cons. const., n° 2017-655 QPC du
15 sept. 2017, M. François G. [Accès aux archives publiques émanant du Président de la République, du
Premier ministre et des autres membres du Gouvernement], JCP A, n° 43-44, 30 oct. 2017, p. 34.
193. Dans ses conclusions sur l'affaire La Fleurette, le commissaire du gouvernement Roujou
estimait qu'« en l'absence de faute de l'administration, la responsabilité de la puissance publique trouve
son fondement dans l'article 13 de la Déclaration des Droit de l'Homme », ROUJOU., concl. sur CE,
Ass., 14 janv. 1938, Société anonyme des produits laitiers « La Fleurette » et sur CE, Ass., 14 janv. 1938,
Compagnie générale de la Grande Pêche, S. 1938.3.25, D. 1938.3.41 et RD publ., 1938, p. 92.
194. DELVOLVÉ P., Le principe d'égalité devant les charges publiques, LGDJ, Bibl. dr.  pub.,
Tome 88, 1969, 468 p.
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