Mélanges - Mélanges en l'honneur du doyen Didier Guével - 405

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ComplianCe et personnes publiques
opérateurs qui leur sont extérieurs, pourquoi pas à l'aide d'instruments de droit
souple, comme les lignes directrices41
.
cependant, la compliance permet de rendre compte du phénomène qui
consiste, pour les opérateurs, à internaliser eux-mêmes la fixation de certains
objectifs et à prendre le soin de mettre en place des procédures de supervision des
comportements dans leur domaine d'activité, de façon spontanée ou afin de respecter
la norme ou la direction indiquée par le droit souple42
la finalité poursuivie reste a priori la même43
.
, qu'elle s'appuie sur des normes
ou des actes de droit souple, mais les acteurs changent de rôle : les opérateurs
deviennent superviseurs, laissant de côté les régulateurs.
ainsi, la compliance est une forme d'autorégulation, dont le ressort se trouve principalement
du côté de l'activité régulée44
. en même temps, elle se fait l'écho, plus ou
moins, de la régulation étatique dont elle ne se détache jamais pleinement. par la
compliance, l'état transmet aux opérateurs (entreprises, collectivités territoriales,
notamment) le soin de transcrire les règles étatiques en normes internes dans leur
langage propre, ce qui les adapte et accroît les chances de les voir respecter.
13. en outre, la compliance permet aussi à l'administration de parvenir à des
buts dont la satisfaction ne peut plus être seulement nationale. en effet, à l'ère de
la mondialisation et de la globalisation des échanges, et en même temps de l'affaiblissement
des états, elle est un moyen de répondre à des buts monumentaux ou
cruciaux de dimension supranationale, ce que ne peut plus faire la seule réglementation
d'un état, qui demeure bornée aux frontières45
, ni d'ailleurs l'utopie
mise dans une réglementation internationale, subordonnée à la volonté des états.
c'est pourquoi des acteurs intervenant sur des espaces (notamment les marchés)
débordant le cadre national apparaissent plus aptes à mettre en œuvre de
tels objectifs. Bien sûr, le risque existe de fragiliser les acteurs les plus faibles, qui
interviennent sur des espaces plus restreints, et qui seront moins légitimes à proposer
le respect de tels objectifs transversaux.
14. alors, sans doute peut-il être trouvé des manifestations anciennes de cette
internalisation des règles et des objectifs au sein de l'administration, qui peut être
considérée comme ayant recours depuis longtemps à des procédés de compliance
innomés, bien qu'à géométrie variable.
ainsi, traditionnellement, l'administration assure la charge, par ses services
publics, de certains besoins des administrés, considérés d'utilité publique ou « cruciaux
». il suffit ici d'évoquer, par exemple, la création des services publics
41. v. not. pour les autorités classiques, ce, 21 sept. 2020, deux espèces, n° 428.683960 ;
e. maupin, « disposer du pouvoir réglementaire n'empêche pas d'édicter des lignes
directrices », AJDA 2020, act., 6 nov. 2020.
42. en ce sens y. gaudemet, « de l'intérêt général à la déontologie (petites observations
sur un grand sujet) », art. précit., p. 229.
43. en ce sens J.-B. auby, « le dialogue de la norme étatique et de la compliance »,
art. précit., p. 103.
44. J.-B. auby, « autorégulations et droit administratif », Dr. adm., oct. 2008, 3.
45. v. not. J.-m. sauvé, « Compliance, droit public et juge administratif », art. précit.,
p. 49 et s.

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