Mélanges - Mélanges en l'honneur du doyen Didier Guével - 417

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réForme de la réserve héréditaire
« le groupe de travail partage la forte conviction que la réserve héréditaire des
descendants est nécessaire »12
. les auteurs du rapport fondent leur conviction au
regard de l'attachement des Français à la réserve héréditaire des enfants et des
justifications tant collectives qu'individuelles de la réserve. en outre, cette notion
est tellement ancrée dans le paysage français que son éventuelle suppression pourrait
conduire à une judiciarisation des successions. de toute façon, sa possible
valeur constitutionnelle serait de nature à empêcher le législateur d'emprunter
cette voie13
.
la seconde constante réside dans la nécessité d'un lien de filiation entre le
défunt et l'héritier réservataire. cette affirmation n'est pas novatrice : la qualité
d'héritier réservataire a toujours été fondée sur l'existence d'un lien de filiation
entre le défunt et ses enfants. néanmoins, la nature de ce lien de filiation pris en
compte par le droit des successions a évolué avec le temps. si sous l'empire du
code napoléonien, seuls les enfants légitimes pouvaient prétendre à une réserve,
le droit contemporain14
a progressivement ouvert la réserve à tous les enfants et
consacré une stricte égalité entre tous les descendants du défunt, quelle que soit
la nature du lien de filiation les reliant à leur auteur.
les auteurs du rapport l'ont mis en avant : l'ancrage de la réserve dans la
filiation empêche une exhérédation laissée à la seule appréciation du défunt. ils
entendent protéger les descendants contre l'instauration de motifs d'exhérédation15
.
l'une des critiques apportées à la réserve héréditaire consiste à lui reprocher
de garantir la même part à tous les descendants, même ceux qui auraient
délaissé leur auteur. le professeur Wicker16
propose d'instaurer un mécanisme
permettant au de cujus de priver de la réserve « celui qui a commis contre lui des
faits de maltraitance ou de violence, ou qui sans excuse légitime a contrevenu à
son obligation d'entretien ou rompu toute relation »17
. cette proposition n'est
pas retenue par les auteurs du rapport. ils craignent qu'un tel mécanisme soit
délicat à mettre en œuvre, en particulier lorsqu'il s'agira de caractériser le désintérêt
de l'enfant. ils considèrent, à juste titre, que la décision de priver un enfant
de tout ou partie de sa réserve ne peut revenir au seul défunt. ils rejoignent ainsi
d'autres éminents auteurs selon lesquels l'exhérédation pour justes motifs18
12. rapp. précit., p. 63.
13. s. Benzina, contribution annexée au rapport, p. 14 et s.
14. en effet, il a fallu attendre la loi n° 72-3 du 3 janv. 1972 pour que les enfants naturels
simples puissent avoir la qualité d'héritier réservataire de leur auteur et la loi n° 2001-1135 du
3 déc. 2001 pour que soit consacrée une stricte égalité entre tous les enfants y compris les
enfants adultérins. l'ordonnance n° 2005-759 du 4 juill. 2005 parachève cette évolution en
faisant disparaître les termes de « légitime » et de « naturels » de tous les textes dont l'art. 913
du c. civ.
15. rapp. p. 118 et s.
16. contribution de g. Wicker annexée au rapport, p. 289. dans le même sens,
g. champenois, contribution annexée au rapport, p. 115.
17. Ibid., p. 294.
18. il s'agirait ici de laisser à la seule appréciation du défunt, la possibilité de priver un
descendant de sa réserve pour désintérêt manifeste. il existe des cas d'indignité successorale
mais ils sont strictement définis par le législateur et non pas laissés à la seule volonté du défunt.

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