Manuel - Droit de la concurrence - 9e - 322

DROIT DE LA CONCURRENCE
anticoncurrentiel peut être déclarée illicite sans avoir reçu application56
arrêt du TUE57
.Un
précise cette notion par le motif suivant : « il est acquis que
certains comportements collusoires, tels que ceux conduisant à la fixation
horizontale des prix par des cartels ou consistant à exclure certains concurrents
du marché, peuvent être considérés comme étant tellement susceptibles
d'avoir des effets négatifs sur, en particulier, les prix, la quantité ou la
qualité des produits ou des services qu'il peut être considéré comme inutile,
aux fins de l'application de l'article 101, paragraphe 1, TFUE, de démontrer
qu'ils ont des effets concrets sur le marché »58
.
Encore faut-il que la qualification de restriction de concurrence par
objet soit réservée à des restrictions présentant en elles-mêmes un degré suffisant
de nocivité pour la concurrence, ce qui implique l'interprétation restrictive
de cette notion59
et une qualification in concreto des accords « compte
tenu de la teneur de leurs dispositions, des objectifs qu'ils visent ainsi que du
TUE, 29 nov. 2012, Groupement des cartes bancaires « CB », aff. T-491/07 ; TUE, 19 déc. 2014, Ordre des pharmaciens,
précité. En application du principe selon lequel les dispositions communautaires doivent être
interprétées et appliquées de manière uniforme à la lumière des versions établies dans les autres langues
de la Communauté, la Cour a maintenu cette interprétation sans avoir égard à la version italienne du traité
qui, par l'emploi de la conjonction « et », pouvait laisser penser que l'application de la prohibition supposait
cumulativement un objet et un effet anticoncurrentiels : 17juill. 1997, Ferriere Nord, aff. C-219/95 P, R,
I-4411, concl. av. gén. Ph. LÉGER.
56. TPI, 14juill. 1994, Herlitz c/Commission, aff. T-66/92, R, II-531 et, relativement à la même entente, TPI,
14juill. 1994, Parker Pen c/Commission, aff. T-77/92, R, II-549.
57. 8 sept. 2016, Lunbeck c/Commission, aff. T-472-13, nº 341. En l'espèce, un fabricant de produits pharmaceutiques
destinés à soigner des pathologies du système nerveux central, dont la dépression, avait déposé
de nombreux brevets dans divers États de l'Union ou de l'EEE, concernant un ingrédient pharmaceutique
actif (IPA) dénommé citalopram, dont certains étaient expirés, puis en avait déposé d'autres concernant un
autre IPA dénommé escipalopram. Il avait conclu avec des fabricants de médicaments génériques des
accords par lesquels ils s'engageaient, moyennant d'importantes rémunérations annuelles, à renoncer à
la fabrication de médicaments utilisant ces IPA. Le Tribunal approuve la Commission de retenir une restriction
de la concurrence par objet car, en interdisant aux entreprises de génériques de contester les brevets
encore valides, ils transformaient l'incertitude quant à l'issue d'un contentieux en certitude et
excluaient par là toute possibilité de concurrence. Un autre arrêt (TUE 10nov. 2017, Icap e.a. c/Commission,
aff. T-180/15) qualifie de restrictions de la concurrence par objet les manipulations des taux de référence
interbancaires, d'un commun accord entre un courtier et des banques, par la diffusion d'informations
erronées en vue de l'estimation des taux de référence futurs sur le marché des produits dérivés de
taux libellés en yens japonais.
58. Le fait qu'une constatation de restriction de concurrence « par objet » dispense l'autorité ou la juridiction
compétente de la nécessité d'examiner les effets de celle-ci n'implique nullement que cette autorité ou
juridiction ne puisse procéder à un tel examen lorsqu'elle l'estime opportun, CJUE, 2 avril 2020,
aff. C-228/18, Gazdasági Versenyhivatal (autorité de la concurrence de la Hongrie ou « GVH »). Il n'ya
aucune différence entre les accords qui sont anticoncurrentiels par leur objet et ceux qui sont anticoncurrentiels
en raison de leurs effets : les uns et les autres restreignent la concurrence dans le marché intérieur
et c'est la raison pour laquelle ils sont en principe interdits. La distinction entre ces deux notions repose
davantage sur des considérations d'ordre probatoire. Elle a pour but d'indiquer aux autorités de concurrencequel
typed'analyse elles sont tenues d'effectuer. Une autorité de concurrence n'est pas tenue d'effectuer
une analyse complète des effets d'un accord, qui est souvent plus longue et exige davantage de
ressources, pour constater et démontrer qu'un accord est anticoncurrentiel par son objet. La Cour précise
aussi que le fait de qualifier un accord de restrictif par objet ou par effet n'a pas non plus la moindre incidence
sur la possibilité de bénéficier d'uneexemption au titre del'article 101, paragraphe 3, TFUE.
59. CJUE, 11 sept. 2014, Groupement des cartes bancaires (CB) c/Commission, aff. C-67/13 P,concl.av. gén.
N.WAHL, précité, annulant un arrêt de TUE (aff. T-491/07) qui avait rejeté le recours de CB contre une
décision de la Commission relevant à sa charge une infraction à l'article 81 CE. ; TUE, 24 sept. 2019,
aff. T-105/17, HSBC.
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