Bibliothèque de droit de l'urbanisme et de l'environnement - Tome 18 - Le passif environnemental de l'entreprise - 37

Introduction

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comptabilité, a du risque une vision exclusivement financière. La perception de
ses risques environnementaux n'en est que plus réduite mais cette conception
s'avère fidèle au droit comptable traditionnel, apte à saisir la facette financière du
risque environnemental. Quand bien même réduite à sa seule facette financière, le
risque environnemental ne peut pas toujours être appréhendé entièrement par la
comptabilité156. Cette limite a trait à l'approche comptable du risque, indépendamment de sa nature, et constitue une autre des faiblesses du droit comptable
traditionnel. C'est la raison pour laquelle nous présentons le droit comptable traditionnel comme un miroir partiellement fidèle d'une approche anthropocentrique du risque environnemental. À l'inverse, le droit comptable traditionnel
semble incapable d'être le reflet fidèle d'une approche biocentrique du risque
environnemental. L'approche biocentrique du risque environnemental donne à
voir la facette écologique du risque. L'environnement s'entend dès lors comme
« une nature qu'il importe de conserver et de protéger »157 face aux menaces que
l'Homme et, plus spécifiquement, l'entreprise, font peser sur lui. Cette configuration permet de voir l'entreprise comme la source du risque pesant sur l'environnement.  Dans cette optique, le droit comptable traditionnel apparaît comme un
miroir déformant dans l'incapacité de refléter la réalité du risque. Le Professeur
J. Richard illustre pertinemment le rapport de l'entreprise à la double facette du
risque environnemental en évoquant « la soi-disant schizophrénie du consommateur, qui, en tant que citoyen veut acheter des produits écologiques, et en tant que
consommateur préfère des produits non écologiques moins chers. Cette situation
vient de ce que les produits polluants ne sont pas facturés à leur véritable prix : c'est
l'entreprise capitaliste qui provoque cette situation et qui est schizophrénique en vantant son attitude « responsable » tout en ne changeant pas ses modes de calcul des
coûts des produits »158.
37.  L'évolution ardemment souhaitée du droit comptable, dans le sens d'une
intégration et d'une préservation systématique d'un capital environnemental,
aurait pour effet de le transformer en miroir fidèle d'une approche hybride donnant du risque environnemental une vision à la fois anthropocentrique et biocentrique. La métamorphose du droit comptable aurait dès lors pour effet de réconcilier deux visions complémentaires du risque environnemental ; renvoyant de ce
dernier une image plus complète, si ce n'est exhaustive, de ce qu'il recouvre.
38.  La distinction entre la conception actuelle du droit comptable et son
évolution souhaitée constitue la trame de fond de nos travaux. Pour autant, bâtir
une démonstration à partir de cette distinction ferait courir le risque d'une
croyance en une incapacité originelle du droit comptable actuel à appréhender le
risque environnemental ; incapacité que seule permettrait de combler son évolution. Une telle orientation, en plus d'être fausse, trahirait l'objectif prioritaire de
rappel des mérites de cette branche du droit. En réalité, seule l'exigence de régulation du risque environnemental nécessite, pour être ne serait-ce que partiellement
satisfaite, une métamorphose du droit comptable. Par ailleurs, scinder nos travaux entre le droit comptable tel qu'il est et le droit comptable tel qu'il devrait être
156. Nous verrons en effet que la comptabilité, si elle s'avère apte à appréhender les situations
relevant de l'incertitude, n'est pas en mesure de saisir les situations relevant de l'ignorance.
157. A.-S.  Epstein, Information environnementale et entreprise, Contribution à l'analyse juridique
d'une régulation, op. cit., n° 14, p. 23.
158. J.  Richard, Comptabilité et développement durable, Economica, 2012, p. 234.

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