Bibliothèque de finances publiques et fiscalité - Tome 71 - La création et la répartition de la valeur en droit fiscal international - 226

214

LA CRÉATION ET LA RÉPARTITION DE LA VALEUR EN DROIT FISCAL INTERNATIONAL

« seuil de pénétration »48 idéal pour apprécier le niveau d'intégration d'une entreprise non-résidente « au sein de l'économie d'un pays pour justifier qu'elle y soit
soumise à l'impôt »49. La corrélation entre le degré de présence physique et le degré
de présence économique sur le territoire d'un État s'est toutefois érodée avec les
progrès techniques réalisés dans le domaine des transports, des communications,
du développement d'internet, de l'automatisation de certaines fonctions productives et, de manière plus générale, de l'ensemble des opportunités qu'ont les entreprises de desservir un marché à distance50.
541.  Les limites de la source des revenus passifs. - Il a été exposé ci-avant que
la détermination de la source des revenus passifs est largement dépendante du
choix entre leur origine matérielle ou leur origine économique (voir supra
§ 357 et s.). En dépit des hésitations théoriques, la solution retenue par les conventions fiscales internationales s'est généralement portée sur la première de ces
approches : la source des revenus passifs correspond généralement à l'État de résidence de leur débiteur, bien que ce principe connaisse certains assouplissements
en matière d'intérêts ou de redevances qui peuvent voir leur source se confondre
avec l'établissement stable qui en assure le paiement. L'érosion des concepts de
résidence et d'établissement stable contamine donc nécessairement la pertinence
des règles sur lesquelles repose la source des revenus passifs.
542.  Les limites des règles conventionnelles sur lesquelles repose la compétence fiscale de l'État de source concernent ainsi non seulement les dispositions
propres à la source des revenus actifs et notamment le concept d'établissement
stable (1.), mais également celles qui fondent la source des revenus passifs (2.).

§ 1. LES LIMITES DE LA SOURCE CONVENTIONNELLE
DES REVENUS ACTIFS

543.  Le concept d'établissement stable que l'on retrouve à l'article  5 des
Modèles OCDE et ONU détermine le seuil de pénétration que doit présenter une
entreprise avec le territoire d'un État pour que cet État soit en droit d'appréhender les revenus qu'elle génère. Cette règle a une fonction duale : elle permet de
déterminer les conditions dans lesquelles les États sont en droit d'imposer les
revenus actifs générés sur leur territoire par des non-résidents, mais également de
répartir ces revenus entre l'État de source et l'État de résidence (le premier n'ayant
qu'un droit d'imposer sur les revenus directement attribuables à l'établissement
stable)51. Ce faisant, et conformément aux prescriptions du Rapport de 1923, la
consécration du critère d'établissement stable au sein des conventions fiscales permet de reconnaître le droit d'imposer de la juridiction au sein de laquelle vit la
communauté dont la vie économique la rend possible52. Cette approche repose
cependant sur le postulat que seuls les moyens de production physiquement identifiables soient susceptibles de générer de la valeur en un lieu, postulat aisément
défendable s'agissant des entreprises des années 1920 dont l'activité ne pouvait
48. OCDE, BEPS Action 1 : Rapport final, op. cit. note 4, p. 29.
49. Ibidem.
50. Eva Escribano Lopez, op. cit. note 174, p. 256.
51. Gary D.  Sprague et Rachel Hersey, op. cit. note 266, p. 302.
52. Société des Nations, Rapport de 1923, op. cit. note 18, p. 26.

978-2-275-07305-7__DOCFILE__corpus.indd 214

05/05/2020 11:21:17

Bibliothèque de finances publiques et fiscalité - Tome 71 - La création et la répartition de la valeur en droit fiscal international

Table des matières de la publication Bibliothèque de finances publiques et fiscalité - Tome 71 - La création et la répartition de la valeur en droit fiscal international