Bibliothèque de finances publiques et fiscalité - Tome 71 - La création et la répartition de la valeur en droit fiscal international - 302

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LA CRÉATION ET LA RÉPARTITION DE LA VALEUR EN DROIT FISCAL INTERNATIONAL

exercée l'activité à l'origine de la création de valeur8. Afin de permettre à la valeur
d'être systématiquement imposée une fois (et une seule) au lieu de sa création, il
conviendrait alors de déterminer des règles qui permettent d'identifier avec plus
de précision les juridictions au sein desquelles cette création a lieu. Chaque État
pourrait alors obtenir sa juste part de la matière taxable9.
716. L'OCDE comme la doctrine fiscale se sont depuis longtemps essayées à
imaginer la manière dont les conventions fiscales pourraient remplir cet objectif.
Les travaux réalisés dans le cadre du plan d'action BEPS reprennent ces solutions
de manière plus ou moins exhaustive. Certaines d'entre elles ont d'ores et déjà été
adoptées par l'OCDE et les gouvernements nationaux. D'abord, le Modèle
OCDE a fait l'objet d'une révision au cours de l'année 2017 afin d'intégrer certaines modifications relatives à la règle de départage de la résidence fiscale des
personnes morales ou de l'établissement stable. Ensuite, une convention multilatérale a été adoptée et ratifiée par de nombreux États pour garantir une synchronisation plus dynamique du réseau de conventions fiscales avec le Modèle
OCDE. Pour indéniables que soient les avancées que permettent ces réformes sur
la forme, elles ne constituent cependant sur le fond qu'un « réexamen de certaines
caractéristiques du système actuel de conventions fiscales bilatérales »10. En d'autres
termes, la convention multilatérale elle-même n'a pour seule vocation que de
« déployer les mesures adoptées [dans le plan d'action BEPS] dans des délais raisonnables tout en préservant la nature bilatérale des conventions fiscales »11, sans
révolutionner la manière dont les États répartissent le pouvoir d'imposer entre
eux. Pourtant, un nombre croissant d'auteurs plaident pour une révision complète de la nature bilatérale des conventions fiscales dont ils critiquent l'obsolescence dans le contexte actuel de mondialisation de l'économie et d'intégration
croissante des marchés12.
717. Si la plupart des acteurs s'accordent sur la nécessité de faire évoluer les
normes fiscales internationales, il n'existe pas de réel consensus quant à la manière
d'y parvenir. Deux trajectoires se dessinent. La première consiste à conserver le
réseau actuel de conventions fiscales bilatérales, tout en modifiant certains principes pour renforcer les principes d'imposition à la résidence ou à la source
(Titre 1). La seconde consiste à repenser entièrement la méthode bilatérale au
profit d'une répartition multilatérale du droit d'imposer qui permettrait de mieux
appréhender les modèles d'affaires structurés autour de chaînes de valeur mondiales13 (Titre 2).

8. Reuven S. Avi-Yonah, op. cit. note 153, p. 169.
9. Maarten F. de Wilde, op. cit. note 77, p. 796.
10. OCDE, BEPS Action 15 : Rapport final, op. cit. note 66, p. 9.
11. Idem, p. 17.
12. V. par ex. Victor Thuronyi, « International Tax Cooperation and a Multilateral Treaty »,
Brooklyn Journal of International Law, Vol. 26, janvier 2001, p. 1641 : « This bilateral approach seems
anomalous in an era where taxpayers have become global and many other regulatory areas increasingly
are being dealt with globally by governments. »
13. OCDE, BEPS Action 1 : Rapport final, op. cit. note 4, p. 16.

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