Bibliothèque de finances publiques et fiscalité - Tome 71 - La création et la répartition de la valeur en droit fiscal international - 32

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LA CRÉATION ET LA RÉPARTITION DE LA VALEUR EN DROIT FISCAL INTERNATIONAL

responsabilité). Dans les deux cas, la présence de l'entreprise au sein de la juridiction de source repose sur un critère de présence physique (une présence matérielle
ou personnelle ou les deux).
3.	 Les transformations de l'économie et leurs effets sur le système fiscal
international
32.  Les développements qui précèdent (voir supra § 24 et s.) attestent du fait
que les conventions fiscales internationales ne sont pas un agrégat de dispositions
éparses qui seraient chacune issue d'un compromis diplomatique visant à ménager les intérêts des différents États à raison d'un type de revenus particulier. Tout
au contraire, elles présentent une mécanique générale qui vise à faire correspondre
le lieu de paiement de l'impôt avec celui des activités à l'origine des revenus que
l'on cherche à répartir119. L'idée selon laquelle les travaux initiés dans le cadre du
projet BEPS viendraient révolutionner ce système pour le recentrer autour de la
notion de valeur semble ainsi devoir être nuancée. La méthodologie prescrite par
les différents rapports de la Société des Nations repose sur une hypothèse simple :
les personnes sont tenues de participer à la recette publique de l'État dans lequel
elles résident conformément à la théorie de la faculté, mais ce principe doit céder
au profit de celui des services rendus lorsque ces personnes sont engagées dans
des activités d'une certaine étendue au sein de l'économie d'un autre État (quand
elles y possèdent un établissement stable). Il faut reconnaître que cette méthodologie de répartition du pouvoir d'imposer conserve sa pertinence globale, bien que
certaines évolutions de l'économie mondiale invitent à réajuster les conclusions
du Rapport de 1923. Ces évolutions concernent autant les règles qui fixent le statut des personnes que celles qui concernent la substance de leurs activités.
33.  Les évolutions dans le statut des personnes. - Le système fiscal international accorde une place centrale au statut personnel des contribuables. Le Rapport
de 1923 soulignait qu'« il est logique d'affirmer que la collectivité parmi laquelle un
individu a volontairement élu de vivre sa vie de tous les jours, mérite tout au moins
qu'il lui vienne en aide »120. Le bénéfice des conventions fiscales est d'ailleurs directement lié à la qualité de « personne » puisque leur champ d'application est réservé
« aux personnes qui sont des résidents d'un État contractant ou des deux États
contractants »121. On notera avec intérêt que cette disposition n'établit aucune distinction selon la nature, physique ou morale, de la personne concernée. Les règles
conventionnelles qui s'appliquent à ces deux catégories de personnes sont donc
identiques dans l'ensemble. Ce traitement indifférencié pouvait paraître ne pas
soulever d'enjeux majeurs dans les années 1920 puisque l'anthropomorphisme des
personnes morales fonctionnait assez bien : la concentration habituelle de leur
actionnariat et de leur pouvoir directeur au sein de leur État de constitution (voir
supra § 18) pouvait justifier qu'on leur reconnaisse un lien « personnel » avec cet
État.  Pour le dire différemment, les personnes morales créées par des individus
ayant élu de vivre parmi une collectivité pouvaient être considérées comme faisant
elles-mêmes partie de cette collectivité. Cependant, deux phénomènes ont entamé
119. Reuven S. Avi-Yonah, op. cit. note 63, p. 1306 : « [...] the 1923 report recommended that in
future negotiations between tax jurisdictions, income items should be classified according to whether the
primary economic activity giving rise to the income takes place in the source country or in the residence
country and that the prior right to tax the income should be divided accordingly between them. »
120. Société des Nations, Rapport de 1923, op. cit. note 18, p. 32.
121. OCDE, Modèle de convention fiscale concernant le revenu et la fortune 2014, Article 1.

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