Bibliothèque de finances publiques et fiscalité - Tome 71 - La création et la répartition de la valeur en droit fiscal international - 411

Le multilatÉralisme dans la rÉpartition du pouvoir d'imposer

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présence de ressources naturelles sur le territoire (lesquelles ne sont pas prises en
compte dans la formule) ou encore d'un pouvoir de marché local spécifique70.
989. L'impossible prise en compte des spécificités locales par la formule de
répartition. - Il faut bien entendu reconnaître que, s'agissant de l'exploitation par
une entreprise des ressources naturelles disponibles sur un territoire, la reconnaissance de la compétence fiscale découlera de la prise en compte des moyens matériels et humains déployés localement pour permettre l'exploitation. Cette observation n'est cependant pas suffisante pour expliquer les raisons pour lesquelles la
formule de répartition ne tient pas compte du potentiel de création de valeur imputable aux facteurs locaux, mais uniquement à celui des moyens que l'entreprise met
en œuvre. Le même raisonnement peut être tenu s'agissant de la qualification de la
main-d'œuvre locale (voir supra § 974 et s.). La valeur générée par les moyens
humains dépend généralement des salaires versés (la formule prenant en compte le
nombre d'employés et la masse salariale) et certainement pas des compétences particulières qui peuvent leur être reconnues. Pour le dire simplement, les méthodes de
répartition proportionnelle existantes créent une compétence fiscale qui suit les
facteurs de production sans varier selon la localisation de ces facteurs (la problématique du poids octroyé à chaque facteur est étudiée infra § 996 et s.).
2.	 Le périmètre limité des facteurs pris en compte dans la formule standard
990.  Même à admettre que le champ couvert pas les trois facteurs contenus
dans la formule de répartition standard est assez large pour appréhender l'ensemble des processus de production de valeur (notamment en reconnaissant le
principe de destination - voir supra § 813 et s.), chacun de ces facteurs possède en
réalité un périmètre dont l'étroitesse est éminemment critiquable.
a)	 Le périmètre limité du facteur « actifs »
991.  L'exclusion des actifs incorporels. - Il faut d'abord rappeler que le facteur « actifs » ne regroupe en réalité que les actifs corporels présents sur le territoire d'un État, à l'exclusion des actifs financiers et incorporels (voir supra § 970)71.
Si la Commission européenne se défend de la propension de ce choix (pris « pour
des raisons pratiques et de simplicité »72) à influencer fondamentalement le résultat
final, on peut exprimer certains doutes à ce sujet. Notamment, les rédacteurs du
projet de directive ACCIS  avancent que la part prise par les actifs incorporels
dans le processus de création de valeur est déjà en partie reconnue par la prise en
compte d'autres facteurs comme celui relatif au travail qui permet d'octroyer une
compétence fiscale à l'État de situation des chercheurs ayant développé les actifs
ou des employés qui les exploitent73. En admettant même que ce puisse être le cas,
cette hypothèse aboutit à une surpondération de la part prise par les employés
dont les fonctions sont associées aux actifs corporels au sein de la formule de
répartition. D'autre part, on peut douter du fait que la prise en compte des
moyens humains reflète correctement la valeur des actifs incorporels à l'intérieur
d'un groupe. Une étude menée par Ocean Tomo en 2017 démontrait que les actifs
70. Charles E.  McLure, op. cit. note 190, p. 12.
71. Julie Roin, op. cit. note 873, p. 26 (pour le système américain) et Commission européenne,
ACCIS : ébauche d'un mécanisme de répartition, op. cit. note 1466, § 30 et s. (pour le système européen).
72. Commission européenne, ACCIS : ébauche d'un mécanisme de répartition, op. cit. note 1466,
§ 30.
73. Idem, § 48.

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