Bibliothèque de droit privé - Tome 597 - La notion de coopération judiciaire - 138

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LA NOTION DE COOPÉRATION JUDICIAIRE

français est liée à l'applicabilité de la loi pénale française30. Elle signifie également
qu'un juge national ne peut condamner qu'en vertu de sa propre loi pénale31.
Le principe de territorialité des jugements est fondé sur le respect de la souveraineté des États et signifie que les jugements répressifs ne produisent d'effets que sur le
territoire où ils ont été prononcés32. À ce propos, Huet et Koering-Joulin affirment
qu'une décision répressive constitue « l'expression de la souveraineté d'un État et a
été rendue en application de la loi de cet État pour protéger son ordre public, elle ne
saurait déployer ses effets dans d'autres États sous peine de violer leur souveraineté »33. Ce principe est également justifié par la protection de l'ordre public national
lésé par l'infraction34. Une infraction commise sur le territoire d'un État porte atteinte
à l'ordre public national de cet État qui est seul en mesure de le défendre35.
tout conflit de lois pénales dans l'espace est inconcevable ». Il en est différemment pour les lois civiles.
La raison de principe en est que la loi civile abandonne à la liberté des individus l'organisation de leurs
relations sociales, tandis que la loi pénale a pour objet principal, sinon exclusif, d'assurer à l'encontre
des individus la protection de l'État.  L'étude des conflits de lois dépasse le cadre de cette thèse. Il
convient, à notre avis, seulement de préciser que la logique du conflit des lois ne relève pas de la
coopération judiciaire. C'est le législateur national qui autorise l'application de la loi étrangère, qu'elle
soit appliquée comme une règle de droit ou comme un simple fait. Lorsqu'un juge applique une loi
étrangère, il n'obéit pas à un législateur étranger, mais se réfère à son propre ordre juridique qui le
renvoie à appliquer une loi étrangère. V. BATIFFOL, Traité, 3e éd., n° 329, p. 384.
Sur la critique de la coïncidence entre la compétence législative et judiciaire, V.
not. H. DONNEDIEU DE VABRES, Principes modernes de droit pénal international, op. cit., p. 174 :
« Appliquer la loi territoriale, la loi du pays où l'infraction a eu lieu, ne signifie pas toujours, pour le
juge, appliquer sa loi propre. La loi territoriale est pour lui une loi étrangère, lorsqu'il est appelé à
connaître d'une infraction commise par un sujet de l'État à l'étranger ».
30. Article 689 du Code de procédure pénale dispose que « les auteurs ou complices d'infractions
commises hors du territoire de la République peuvent être poursuivis et jugés par les juridictions
françaises (...) lorsque, conformément aux dispositions du livre Ier du Code pénal ou d'un autre texte
législatif, la loi française est applicable (...) ».
31. E.  BARTIN, Études de droit international privé, Paris, A. Chevalier-Marescq, 1899, p. 214 :
« [E]n droit pénal international, le juge n'applique jamais que sa propre loi et il l'applique toujours
comme loi normalement applicable au rapport de droit. Le juge d'un État ne sera jamais saisi de la
répression du fait incriminé que si ce fait constitue un délit au regard de l'État au nom duquel il punit,
et au regard de la loi qu'il a pour mission d'appliquer ».
32. Cette règle, établie par la pratique, n'a été consacrée par aucun texte. V. en ce sens,
C. LOMBOIS, Droit pénal international, op. cit., n° 296 ; L. HUGUENEY, Cours de droit criminel,
1950, p. 507. La Cour de cassation avait affirmé sa position dans un arrêt du 21 mars 1862 (S. 1862.1,
p. 541), en affirmant que les jugements répressifs étrangers ne pouvaient être exécutés en France. Elle
a par ailleurs énoncé dans un arrêt de la chambre criminelle en date du 30  avril 1885 que les
« condamnations pénales prononcées par les tribunaux étrangers [étaient] sans application en France »
(S. 1886.1, p. 132). V. aussi H. DONNEDIEU DE VABRES, Les principes modernes du droit pénal
international, op. cit., p. 304 : « la sentence pénale étrangère est l'émanation, donc l'expression, d'une
souveraineté étrangère. Donc l'État qui lui donne accès sur son territoire, soit en lui attachant la force
exécutoire, soit en l'admettant pour fondement de l'exception de chose jugée, incline devant une
volonté étrangère sa propre volonté, devant une souveraineté étrangère, sa propre souveraineté. Il
renonce à son autonomie ; il sacrifie son indépendance. Ou du moins, une concession de ce genre, pour
ne pas être une abdication, doit être présentée comme un acte gracieux et bénévole, qui n'implique
aucune obligation préexistante, et qui n'engage pas l'avenir »
33. 
A. 
HUET et R. 
KOERING-JOULIN, « 
Effets en France des décisions répressives
étrangères », J.-Cl. Droit international, fasc. 404-10, p. 3.
34. P.  BOUZAT, Traité théorique et pratique de droit pénal, n° 1542, p. 1096 ; H. DONNEDIEU
DE VABRES, Traité de droit criminel et de législation pénale, Paris, Sirey, 3e éd., 1947, n° 1628, p. 925 ;
G.  GIDEL, De l'efficacité extraterritoriale des jugements répressifs, thèse, 1905 ; R.  GARRAUD,
Traité pratique et théorique du droit pénal français, t. I, L. Larose, 2e éd., 1913, n° 203.
35. M.  TRAVERS, Le droit pénal international et sa mise en œuvre en temps de paix et en temps
de guerre, t. I, Sirey 1920, n° 25, p. 28 : « En outre, et c'est là peut-être l'argument essentiel, un État

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