Bibliothèque de droit privé - Tome 599 - Les théories objective et subjective du contrat - 186

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LES THÉORIES OBJECTIVE ET SUBJECTIVE DU CONTRAT

[lawful freedom of action] dans les limites prescrites de l'accord avec son oncle, et
maintenant, ayant totalement accompli ce qui lui était demandé, il est inutile de se
demander si cette action a véritablement été bénéfique au promettant, et la Cour ne
va pas s'interroger sur ce point-là ; mais, si la recherche avait été faite, nous ne
voyons rien qui permettrait de prouver que l'oncle n'a pas été bénéficiaire au sens
légal du terme »29.
En cela, il ne n'agissait pas de vérifier si l'oncle avait effectivement bénéficié
de l'abstention de son neveu, mais simplement de s'assurer que le neveu avait été
privé d'une de ses possibilités d'action au regard des conditions posées par la
promesse.
231. - Quant à cet arrêt, deux remarques préliminaires à une analyse plus
poussée semblent pouvoir être faites. En premier lieu, nous sommes ici dans le cas
d'un contrat unilatéral au sens du droit américain puisque le neveu s'est fondé sur
la promesse pour agir et n'a pas promis en retour de s'abstenir de fumer, de boire
ou de parier. Farnsworh écrit  qu'« [e]n formant un contrat unilatéral, il n'y a
qu'une partie qui fait une promesse : l'offrant fait la promesse contenue dans l'offre,
et le bénéficiaire de la promesse fait quelque action comme acceptation »30.
Ainsi, le contrat est unilatéral car il est accepté par une action (une abstention en l'espèce) - il aurait pu être accepté par une promesse manifestée, c'est-àdire objectivement saisissable et il aurait, dans ce cas, été bilatéral (une promesse
contre une promesse)31.
232. - En second lieu, il semble que l'on commence à saisir en quoi le droit
des contrats américains protège l'échange plutôt que l'attente subjective suscitée
par l'apparence de volonté de l'autre partie. En effet, le droit américain fonctionne
un peu comme une balance : il s'agit de s'assurer qu'il y a des poids de chaque côté
- quels qu'ils soient, puisque le juge n'est pas en mesure de vérifier leur équilibre.
Dans l'affaire Hamer v. Sidway, on a une perte patrimoniale d'un côté contre une
abstention limitant la liberté d'un autre côté. La consideration est considérée objectivement, en dehors de la volonté des parties. Il ne s'agit pas vérifier que la raison
ayant poussé l'oncle à promettre à son neveu une certaine somme d'argent est juridiquement valable, mais de s'assurer que concrètement, objectivement, d'un point
de vue extérieur, les deux parties ont bien échangé quelque chose.
233. - Il s'agit maintenant d'essayer d'analyser cette décision. L'arrêt Hamer
v. Sidway est souvent présenté comme étant l'application d'une conception large
de la consideration aujourd'hui abandonnée. En effet, la doctrine américaine considère communément que l'on est passé d'une appréhension de la contrepartie
29. "That right he abandoned for a period of years upon the strength of the promise of the
testator that for such forbearance he would give him $5,000. We need not speculate on the effort which
may have been required to give up the use of those stimulants. It is sufficient that he restricted his
lawful freedom of action within certain prescribed limits upon the faith of his uncle's agreement, and
now, having fully performed the conditions imposed, it is of no moment whether such performance
actually proved a benefit to the promisor, and the court will not inquire into it ; but, were it a proper
subject of inquiry, we see nothing in this record that would permit a determination that the uncle was
not benefited in a legal sense."
30. E. Allan FARNSWORTH, Contracts, op. cit., p. 111., §3.4
31. Mais il semble bien que la promesse du neveu de s'abstenir de fumer, de boire ou de jouer
jusqu'à ses 21 ans n'aurait pas suffi pour former le contrat, la promesse de l'oncle pouvant être
interprétée comme visant l'abstention du neveu, plutôt que sa promesse de s'abstenir. Excellente
remarque, à mettre dans le texte même à mon avis.

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