Bibliothèque de droit privé - Tome 599 - Les théories objective et subjective du contrat - 63

L'approche française : la théorie subjective objectivée

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lorsqu'un malentendu fondamental empêche les consentements des parties de se
rencontrer, ce qui se présenterait dans deux types de situations. Plusieurs arrêts
ont été analysés comme étant des cas d'erreur-obstacle. Il est vrai que, dans
chacun de ces arrêts, il semble bien que les volontés subjectives ne se soient pas
rencontrées. Nous verrons cependant que les juges prononcent malgré tout la
nullité du contrat : c'est donc que le contrat existait. Le critère de son existence
ne semble ainsi pas être la rencontre des volontés internes. Voyons d'abord la
présentation doctrinale de l'erreur-obstacle (§1) avant d'en examiner la réception jurisprudentielle (§2).

§ 1. LA PRÉSENTATION DOCTRINALE
DE L'ERREUR-OBSTACLE

55. - Le doyen Carbonnier écrit qu'« [u]ne théorie de l'erreur contractuelle,
pour être complète, doit embrasser toutes les catégories d'erreurs qui peuvent se
produire dans la formation du contrat : non pas seulement celle qui vicie le consentement sans l'exclure, l'erreur-nullité, mais aussi celle qui exclut le consentement en
faisant plus que le vicier et met ainsi obstacle à la formation même du contrat, l'erreur-obstacle (expression consacrée ; erreur-inexistence, pourrait-on dire), et même
l'erreur indifférente, qui reste sans influence sur la validité de la convention »5.
En d'autres termes, il y aurait, à côté de l'erreur-vice du consentement, une
erreur qui empêche le contrat de se former du fait d'un malentendu sur un élément essentiel du contrat.
Aujourd'hui, la grande majorité des manuels de droit des contrats français
présentent l'erreur-obstacle avant de consacrer des développements relatifs à l'erreur-vice du consentement.
Pour les professeurs Terré, Simler et Lequette, « [e]lle résulte d'un malentendu radical. Par suite d'un "quiproquo", il arrive que sous les déclarations formelles, en apparence concordantes, les volontés réelles ne se soient pas rencontrées.
L'accord ne s'est pas opéré parce que les parties n'ont pas, en réalité, voulu la même
chose. Il manque au contrat une condition essentielle à sa formation : l'intention
commune, l'entente véritable. L'erreur commise par les parties est si grave qu'elle
fait obstacle, d'où son nom, à la rencontre des volontés »6.
Ainsi, il y a eu apparence de rencontre des volontés mais il n'y a pas eu rencontre des volontés « réelles ». La réalité de la volonté ne se trouverait pas dans sa
manifestation mais bien plutôt dans l'esprit de la personne, dans son for intérieur,
dans sa psyché. Le droit des contrats s'attacherait alors à ce que ces auteurs
appellent l' « entente véritable ». En d'autres termes, le contrat se créerait par l'accord de deux intentions bien plus que dans celui de deux manifestations.
privé, évoque l'erreur-obstacle qui « entraîne l'inexistence de l'acte » (Louis JOSSERAND, Les
mobiles dans les actes juridiques du droit privé, [Réimpression de l'édition de 1928], Préf. D. Deroussin.,
Paris, France, Dalloz, 2006, p. 47, §33.).
5. Jean CARBONNIER, Droit civil. Tome 2 - Les biens, Les obligations., 1re éd. « Quadrige »
reprenant la 22e éd. de 2000., Paris, PUF, 2004, p. 1990, §956.
6. François TERRÉ, Philippe SIMLER et Yves LEQUETTE, Droit civil. Les obligations.,
11e éd., Paris, Dalloz, 2013, p. 234, §210.

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