Bibliothèque de droit privé - Tome 600 - L'usufruit atypique - 235

Un partage des utilités de la chose

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qu'un indivisaire en nue-propriété puisse contraindre l'usufruitier à céder son
droit aux fins de partage, qu'il s'agisse ou non d'une indivision complexe. Sans
doute conscient de ces excès, le législateur a cependant mis fin à cette pratique par
la loi du 6 juillet 1987, dont il résulte que « le juge ne peut, à la demande d'un nupropriétaire, ordonner la vente de la pleine propriété d'un bien grevé d'usufruit
contre la volonté de l'usufruitier » (C. civ., art. 815-5 al. 2 nouveau). En présence
d'une indivision en nue-propriété, la règle demeure donc l'impossibilité d'une licitation de la pleine propriété.
La loi du 23 juin 2006 est venue confirmer ces principes en affirmant qu'un
indivisaire en nue-propriété ne peut demander qu'un partage de la nue-propriété
indivise (C. civ., art. 818). En outre, le texte vient préciser qu'« en cas de licitation de
la pleine propriété, le deuxième alinéa de l'article 815-5 est applicable ». Dès lors, si
une licitation de la pleine propriété demeure possible, celle-ci ne peut se faire sans
l'accord de l'usufruitier, dont l'indépendance des droits est ainsi préservée.
Il n'en va pas de même, cependant, des droits du nu-propriétaire. En effet,
l'article 817 du Code civil prévoit que dans les hypothèses d'indivision en usufruit
ou d'indivision en jouissance46, une licitation de la pleine propriété peut être ordonnée « lorsqu'elle apparaît seule protectrice de l'intérêt de tous les titulaires de droits
sur le bien indivis »47. Reprenant la jurisprudence précitée, le texte consacre ainsi
une véritable atteinte à l'autonomie des droits du nu-propriétaire qui pourra être
contraint, par un indivisaire en jouissance, à céder son droit aux fins de partage.
344.  Autres tempéraments - Au-delà de la possibilité d'un partage des droits
en cause, d'autres tempéraments à l'absence d'indivision entre les parties peuvent
être évoqués. D'abord, « en dépit de l'absence d'indivision entre [l'usufruitier et le
nu-propriétaire], chacun dispose d'un droit de préemption subsidiaire sur une
quote-part indivise du droit complémentaire si aucun coïndivisaire ne manifeste
sa volonté d'exercer son propre droit de préemption »48. Autrement dit, si un coïndivisaire n'exerce pas son droit de préemption lors de la cession d'un droit indivis
en nue-propriété, l'usufruitier pourra se porter acquéreur, et réciproquement. Cette possibilité révèle ainsi qu'il existe une certaine corrélation entre usufruit et nue-propriété. En outre, l'article 1873-16 du Code civil précise que si un
bien indivis est grevé d'usufruit, une convention d'indivision peut être passée
entre les nus propriétaires ou entre les usufruitiers, mais aussi entre les uns et les
autres, ce qui confirme l'interdépendance de ces droits.
L'absence d'indivision entre les parties est donc fortement tempérée par le
droit positif. Il en va de même de l'absence de rapports personnels entre usufruitier et nu-propriétaire.
b)	 Tempéraments à l'absence de rapports personnels
345.  Absence d'obligations du nu-propriétaire - L'absence de rapports personnels entre l'usufruitier et le nu-propriétaire est souvent invoquée pour décrire la
situation du nu-propriétaire. Les ouvrages se plaisent à souligner que cette
46. Rappelons qu'en présence d'un usufruit de quote-part, c'est-à-dire d'une indivision complexe
entre un plein propriétaire et un usufruitier partiel, il faut parler d'indivision en jouissance pour ne pas
laisser entendre qu'un plein propriétaire dispose d'un usufruit sur son bien.
47. Ce texte consacre ici la solution jurisprudentielle antérieure à la loi du 6 juillet 1987 cf. Req.,
20 juillet 1932, précité.
48. TERRÉ et SIMLER, Droit civil, Les biens, op. cit., n° 779, p. 708.

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