Bibliothèque de droit privé - Tome 601 - Le consentement de la personne morale - 295

L'individualité du consentement et l'appartenance à un groupe

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équivoque suffit à exprimer un consentement217. Le consensualisme se comprend
en effet comme un principe d'indifférence des formes d'expression de la volonté.
En s'immisçant de façon significative et ostensible dans le contrat de sa filiale,
sans justifier d'un quelconque pouvoir de représentation, la société mère exprime
indéniablement un intérêt pour ce contrat et manifeste au cocontractant de la
filiale une volonté d'être liée par le contrat. Elle peut bien sûr se défendre, a posteriori, d'avoir eu la moindre intention de consentir. Mais seule importe la volonté
qui était la sienne au moment où elle participait soit à la conclusion du contrat
soit à son exécution, voire les deux à la fois. Le caractère trouble de la volonté
manifesté par la société mère à travers son comportement ne devrait donc pas
empêcher le juge de pouvoir reconnaître l'existence d'un consentement tacite.
Cette interprétation subjective de l'immixtion dans le contrat force quelque
peu le consentement de la société mère en le présumant d'un comportement qui
n'est pas dépourvu de toute équivoque. Pour autant, elle est à même de circonscrire étroitement les cas dans lesquels la société mère peut être tenue par les engagements de sa filiale du fait de son immixtion dans le contrat.  Pour préserver
l'individualité du consentement des sociétés du groupe, seule une immixtion
ostensible et manifeste de la société mère dans la relation contractuelle de sa filiale
-  que ce soit par son intensité ou sa durée  -, devrait ainsi permettre de présumer
son consentement et donc de l'engager contractuellement.
b)	 Le consentement révélé par l'immixtion : un raisonnement déjà pratiqué
en droit de l'arbitrage international
464.  Si, pour l'heure, cette analyse du consentement implicite de la société
mère révélé par l'immixtion dans le contrat de sa filiale n'est pas retenue en droit
civil -   qui persiste à maintenir l'immixtion dans le giron de l'apparence trompeuse  -, elle est pleinement reprise par le droit de l'arbitrage international. Du
fondement contractuel de l'arbitrage, il s'induit que le consentement des parties
constitue non seulement une condition de validité de la clause d'arbitrage mais
surtout qu'il est le fondement du pouvoir juridictionnel des arbitres218. La Cour
de cassation rappelle régulièrement l'exigence du consentement à l'arbitrage219. Il
est pourtant des hypothèses où la clause compromissoire se voit étendue à d'autres
personnes qu'à celles qui y ont personnellement consenti dès lors qu'elles ont été
impliquées dans le contrat principal, dès sa conclusion ou au stade de son exécution220. Justifiée par le souci d'une concentration du contentieux devant le tribunal arbitral, cette extension trouve prioritairement à s'appliquer au sein des
217. J.  GHESTIN, G. LOISEAU et  Y.-M. SERINET, La formation du contrat, t.  1, Le
contrat. Le consentement, op. cit., n° 914.
218. C.  PANOU, Le consentement à l'arbitrage : Étude méthodologique du droit international
privé de l'arbitrage, IRJS, 2001, n° 185 et s.
219. Cass.  1re civ., 19  mars 2002, n°  99-19878 ; Bull.  civ., I, n°  94 ; RTD  com.  2002.664,
obs. E. LOQUIN : « seule la volonté commune des contractants a le pouvoir d'investir l'arbitre de son
pouvoir juridictionnel ».
220. CA Paris, 21  oct.  1983, Rev.  arbitrage 1984, p.  98, note A.  CHAPELLE ; CA Paris,
30  nov.  1988, Rev.  arbitrage 1989, p.  153, note P.-Y.  TCHANZ ; CA Paris, 7  déc. 1994, RTD  com.
1995.401, obs. E. LOQUIN et J.-C. DUBARRY : « dans le droit de l'arbitrage international, les effets
de la clause compromissoire s'étendent aux parties directement impliquées dans l'exécution du contrat
dès lors que leurs situations et leurs activités font présumer qu'elles avaient connaissance de l'existence
et de la portée de cette clause afin que l'arbitre puisse être saisi de tous les aspects économiques et
juridiques du litige ».

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