Bibliothèque de droit privé - Tome 601 - Le consentement de la personne morale - 62

LE CONSENTEMENT DE LA PERSONNE MORALE

consentement pouvait être exprimé à travers une résolution : « Une délibération
de l'assemblée des associés suffit, incontestablement, à exprimer une volonté de
contracter avec telle personne déterminée, selon telles dispositions précises. Il n'y
a aucun obstacle à ce que l'accord de volontés s'opère sur la base d'un procèsverbal de délibération »118. Le constat peut être élargi : toute personne morale
peut valablement exprimer son consentement par le biais d'une résolution119.
57. La résolution n'est cependant pas le moyen le plus commode pour consentir un engagement contractuel, négocier avec autrui et lui faire connaître une offre
de contracter ou une acceptation120. L'intervention d'un représentant, personne
physique, se révèle alors nécessaire pour engager régulièrement la personne morale
à l'égard des tiers. Et ce n'est pas minimiser le rôle considérable tenu par la représentation que d'approuver cet auteur qui affirme qu'« il n'y a pas de grande différence
entre [la personne morale] et la personne physique qui recourt à la représentation
pour tous les actes que la distance l'empêche de réaliser personnellement »121.
-Toutefois, les enjeux ne sont pas du même ordre. Il ne s'agit pas, dans le cas de la
personne morale, de recourir à la représentation dans le seul but de supprimer les
obstacles posés par la distance et le temps. Il s'agit ici surtout de pallier la difficulté
pratique que constitue l'immatérialité de son être. C'est uniquement pour lever cette
difficulté structurelle que l'engagement de la personne morale requiert, concrètement, l'intervention d'un représentant122. En somme, la technique de la représentation s'impose comme une nécessité pratique pour fluidifier et faciliter l'expression
du consentement des personnes morales dès lors qu'elles participent de façon soutenue au commerce juridique123. Il n'en demeure pas moins que la représentation
n'est pas juridiquement nécessaire à leur consentement et que la pleine capacité
juridique des personnes morales se trouve bien vérifiée.

§ 2. LA REPRÉSENTATION, UNE TECHNIQUE NON SUFFISANTE
AU CONSENTEMENT DE LA PERSONNE MORALE

58. On relève que l'appréhension des pouvoirs du dirigeant à travers le spectre
de la représentation n'a jamais permis d'expliquer son habilitation générale à engager la société à l'égard des tiers (A). La théorie de l'organe a proposé une nouvelle
forme d'imputation de volonté qui n'a pas non plus su convaincre pleinement (B).
118. C. PRIETO, La société contractante, op. cit., n° 50.
119. L. ATTUEL-MENDES, Consentement et actes juridiques, op. cit., n° 417 : « Il ne fait aucun
doute qu'une offre puisse être émise à la suite de la délibération d'une collectivité territoriale et donc
qu'un consentement puisse être émis par une collectivité ».
120. J.-M. MOUSSERON, « À propos des résolutions d'associés », préc. : « Les résolutions de
l'assemblée sont inaptes à exprimer de façon générale la voix de la société. Elles ne seront donc
qu'exceptionnellement une manifestation de la volonté sociale ».
121. H. MOUBSIT, La représentation en droit des sociétés, op. cit., p. 82.
122. M. LORNE, De la responsabilité civile des personnes morales et de leurs représentants,
op. cit., p. 98 : la personne morale « n'est pas un être muet mais elle parle difficilement, elle ne se
désintéresse nullement de ses affaires, mais elle ne peut par elle-même s'en occuper que rarement ;
aussi pour la gestion de ses intérêts et l'administration de son patrimoine, a-t-elle recours à des tiers
chargés d'agir en son nom ».
123. C. PRIETO, La société contractante, op. cit., n° 49 : « Le recours à des représentants légaux
n'est, en définitive, qu'une commodité qui correspond à une rationalisation du fonctionnement
sociétaire, par souci d'efficacité et de rapidité dans les relations avec les tiers. Mais ce n'est pas une
nécessité fondamentale ».

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