Bibliothèque de droit privé - Tome 601 - Le consentement de la personne morale - 87

L'extériorisation de la volonté par les organes représentants

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L'émoi de la doctrine et des praticiens, relayé par un parlementaire293, a
conduit le législateur à introduire un nouvel alinéa 3 à l'article L. 227-6 du Code
de commerce disposant que « les statuts peuvent prévoir les conditions dans lesquelles une ou plusieurs personnes autres que le président, portant le titre de
directeur général ou de directeur général délégué, peuvent exercer les pouvoirs
confiés à ce dernier par le présent article »294. Cette disposition brise la jurisprudence de 2002 tout en respectant son esprit. Nous y percevons en effet l'affirmation du pouvoir exclusif du législateur dans la désignation des organes de
-représentation des SAS. Ainsi, dans la plus contractuelle des sociétés commerciales, le législateur reste-t-il maître absolu de la détermination de l'organe de
représentation. Point de représentation en dehors des prévisions légales.
103.  D'autres exemples, moins spectaculaires, attestent à l'envi que le
monopole légal de la détermination du pouvoir de représentation s'impose
quelles que soient les circonstances pouvant affecter personnellement l'organe
représentant. Ainsi, il a été jugé que le tuteur d'un gérant de SNC devenu incapable n'avait pas le pouvoir de représenter la société295. L'organe légal de représentation ne peut donc pas se faire lui-même représenter pour exercer son
-pouvoir de représentation.
104.  Le monopole légal, on le voit, comporte des avantages et des inconvénients. Ses avantages sont bien connus : la détermination légale de l'organe de
représentation procure une indéniable sécurité aux tiers qui, grâce au système de
publicité légale de nomination des organes dirigeants, peuvent rapidement et simplement identifier quel organe a le pouvoir de représenter la société à leur égard.
Quant à ses faiblesses, elles se manifestent rarement mais doivent néanmoins être
évoquées : par définition, les circonstances inhabituelles ne peuvent pas être
toutes prévues par le législateur et des hypothèses de vacance de la représentation
de la société sont possibles. Cette vacance peut avoir différentes causes : incapacité, interdiction professionnelle ou encore décès de l'organe représentant296. Le
droit des sociétés ne prévoit pas de procédure de transition297 et il appartient alors
à l'organe compétent de désigner un nouveau dirigeant298. La période de latence
qui s'écoulera entre la nomination d'un nouveau représentant ou la désignation
d'un administrateur provisoire laissera la société sans possibilité d'être représentée, et donc de consentir, sauf si des délégations de pouvoir avaient été préalablement octroyées. La durée de cette période de latence peut varier. Ainsi que le
293. Question écrite n° 03417 de Ph. MARINI, JO Sénat du 254 oct. 2002, p. 2445.
294. Loi n° 2003-706 du 1er août 2003 de sécurité financière.
295. Cass. com., 22 oct. 2013, n° 12-24658, BJS, janv. 2014, p. 32, note F.-X. LUCAS.
296. T.  FAVARIO, « Le décès du dirigeant social », D.  2017.1668. L'hypothèse du dirigeant
décédé non remplacé n'est pas théorique, elle est même déjà remontée à la Cour de cassation, qui a
confirmé qu'une société dont le dirigeant était décédé ne peut valablement s'engager à l'égard des
tiers : Cass. 1re civ., 12 nov. 2015, n° 14-23340, Bull. civ., IV ; RTD civ. 2016.105, obs. H. BARBIER ;
Dr. & patr., juin 2016, n° 259, p. 80, note D. PORACCHIA.
297. Sinon l'intervention d'un mandataire ad hoc chargé de convoquer l'organe compétent pour
désigner le nouveau dirigeant. Mais ce mandataire est toujours désigné à la demande de l'associé le
plus diligent. V. art 1846 C. civ (sociétés civiles) ; art. L. 223-27 C. com. (SARL). La jurisprudence a
reconnu cette faculté dans les SAS : Cass. com., 25 mars 2014, n° 13-16089 ; Dr. sociétés, août 2014,
n°  8-9, comm.  127. La loi n°  2019-744 du 19  juillet  2019 de simplification, de clarification et
d'actualisation du droit des sociétés n'a modifié qu'à la marge ces dispositions. Pour les sociétés civiles,
le législateur prévoit même qu'une carence de gérance durant plus d'un mois emporte dissolution de
la société (art. 1846-1 C. civ.).
298. T. FAVARIO, « Le décès du dirigeant social », préc.

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