Contextes - La norme culturelle dans l'ordre juridique - 178

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L'emprise de la norme étatique	

Coupes budgétaires, politiques publiques inexistantes, institutions
insuffisantes, acteurs de la justice insensibles aux manifestations pratiques
de la norme culturelle sont les nombreux obstacles que les individus doivent
surmonter afin de se faire reconnaître l'exercice d'une norme culturelle
pleinement réceptionnée.
La mise en œuvre de la norme culturelle fait donc défaut et son exercice
devient impossible en la menaçant d'extinction. Les combats de coqs sont
donc condamnés à la disparition, car malgré la tolérance de cette pratique
culturelle d'outre-mer, la norme étatique n'encourage pas pour autant son
développement au-delà de la concession déjà octroyée. Pire, elle la décourage l'amenant vers la disparition en prohibant la création de nouveaux
gallodromes. Lorsque la norme culturelle est découragée, il est fait en sorte
qu'elle ne se pérennise pas82.
La norme culturelle est aussi inefficace à l'heure de perpétuer le prénom
d'un arrière-grand-père, symbole d'une culture locale et familiale, lorsque
l'office de l'état civil refuse d'inscrire le prénom sous l'argument de ne
pas respecter les « signes diacritiques connus de la langue française »83.
En l'espèce, les parents d'un petit garçon né à Quimper le 11 mai 2017
voulaient le prénommer Fañch en honneur à son arrière-grand-père breton.
Lors de la déclaration de naissance, l'officier d'état civil a refusé de prendre
en compte le tilde, mais face aux contestations de la ville et des parents,
l'officier de l'état civil a établi une rectification au visa des articles 99-1
du Code civil et 1047 du Code de procédure civile. Le ministère public
a saisi le président du tribunal de grande instance aux fins d'annulation
de la rectification sur le principe de la rédaction en langue française des
actes publics sur le territoire de la république (Const., art. 2, al. 1er). Face
à la décision d'annulation prononcée en première instance, les parents ont
interjeté appel, se fondant sur la liberté des pères et mères du choix du
nom des enfants (C. civ., art. 57), devant la cour d'appel de Rennes qui leur
82. La création de nouveau gallodromes est interdite par le Code pénal art. 521-1 al. 8.
Sur la constitutionnalité de la différence de traitement législative entre le combat de coqs
et les corridas, le Conseil constitutionnel a répondu : « si le législateur a entendu, tant pour
les courses de taureaux que pour les combats de coqs, fonder l'exclusion de responsabilité
pénale sur l'existence d'une tradition ininterrompue, il s'agit toutefois de pratiques distinctes
par leur nature ; qu'il ressort des travaux préparatoires de la loi du 8 juillet 1964 susvisée que
le législateur a entendu encadrer plus strictement l'exclusion de responsabilité pénale pour
les combats de coqs afin d'accompagner et de favoriser l'extinction de ces pratiques ; qu'en
interdisant la création de nouveaux gallodromes, le législateur a traité différemment des
situations différentes ; que la différence de traitement qui résulte de l'incrimination de toute
création d'un nouveau gallodrome est en rapport direct avec l'objet de la loi qui l'établit ;
que par suite, le grief tiré d'une atteinte au principe d'égalité devant la loi doit être écarté »
(Cons. const., 31 juill. 2015, n° 2015-477 QPC - Nous surlignons). Pour une application
récente, v. Cass. crim., 11 sept. 2018, n° 17-85817.
83. CA Rennes, 19 nov. 2018, n° 17/07569 : D. actu. 27 nov. 2018, obs. L. Gareille.
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