Cours - Droit des régimes matrimoniaux, du PACS et du concubinage - 7e - 156

DROIT DES RÉGIMES MATRIMONIAUX, DU PACS ET DU CONCUBINAGE
I. Le ménage en crise
126 À lire le droit contemporain, on vient parfois à se demander si la famille n'est pas devenue un
«ménageà trois » : lemari, la femmeet lejuge ; tant celui-ci est invité à intervenir (à tempset à
contretemps) pour jouer le juge de paix.
127 Droit de la communauté. - L'article 1426 est le pendant de l'article 219 déjà étudié. Il a d'ailleurs le
même dessein : transférer les pouvoirs dont dispose un époux à l'autre lorsque ce dernier ne peut agir
de sa seule initiative. Simplement l'article 219 vise les actes du régime impératif et l'article 1426 les
actes de gestion de la communauté : les deux textes se complètent nécessairement puisque le
régime supplétif vient en complément du régime impératif.
Cet article peut entrer en jeu « si l'un des époux se trouve, d'une manière durable, hors d'état de
manifester sa volonté, ou si sa gestion de la communauté atteste l'inaptitude ou la fraude ». Cette
situation est la même que celle visée par les articles 217 et 219 du régime primaire, à la différence
qu'elle doit ici avoir un caractère durable. La défaillance n'est pas temporaire et l'état a vocation à
se prolonger. L'inaptitude vise la négligence ou l'incompétence d'un époux entraînant des fautes de
gestion54
nauté.
Le texte permet, dès lors, au juge (aujourd'hui celui des affaires familiales) de « substituer » un époux
dans l'exercice des pouvoirs de l'autre. Néanmoins, en cas de gestion concurrente, un simple retrait
de pouvoir suffit. La substitution ne se rencontrera en tant que telle, que lorsque l'époux a commis
une faute dans la gestion exclusive d'un bien dans le cadre de l'exercice d'une profession séparée.
En cas de cogestion, une question se pose : comment l'époux habilité peut-il effectuer un acte pour
lequel le consentement de son époux est nécessaire alors même que celui-ci s'est vu retirer ses
pouvoirs ? Peut-il le consentir seul ? L'article 1426 règle cette question : « le conjoint, ainsi habilité par
justice, a les mêmes pouvoirs qu'aurait eus l'époux qu'il remplace, il passe avec l'autorisation de
justice les actes pour lesquels son consentement aurait été requis s'il n'y avait pas eu substitution ».
C'est donc bien un « transfert de pouvoirs ». En quelque sorte l'un des deux seigneurs de la communauté
devient le régent de l'autre. Celui contre lequel la décision est prise est, toutefois, protégé par
l'inscription judiciaire d'unehypothèquelégalesur lesbiens de l'autre (C. civ., art. 2138).
Les effets de l'habilitation judiciaire sont différents de ceux de l'article 219 du Code civil qui entraînent
la représentation judiciaire. Les actes accomplis par l'époux habilité n'engagent que celui-ci et sont
seulement opposables à son conjoint dessaisi. Le jugement opérant substitution de pouvoirs rétroagit
au jour de la demande. De la sorte, les actes accomplis pendant l'instance par le défendeur ne
peuvent produire effet.
Enfin, le conjoint dessaisi peut demander au juge la restitution de ses pouvoirs, s'il établit que le
retrait n'est plus justifié : « L'époux privé de ses pouvoirs pourra, par la suite, en demander au tribunal
la restitution, en établissant que leur transfert à l'autre conjoint n'est plus justifié. » (C. civ., art. 1426
al. 3).
En réalité, l'article 1426 joue de moins en moins. Premièrement, parce que le seul cas où il y aura à la
fois situation durable et impossibilité de manifestation de la volonté c'est celui où l'un des époux ne
54. Ex. : une épouse qui s'endette sous l'emprise d'un magnétiseur : CA Paris, 17 avr. 1996, JCP 1997.I.4008, no
Bull. civ. Ino
2.
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15, Simler ; Cass. 1re
civ., 31 janv. 1984,
.La fraude suppose l'intention de nuire, en privant le conjoint de ses droits dans la commu
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