Cours - Droit des régimes matrimoniaux, du PACS et du concubinage - 7e - 45

L'indépendance des époux
la solidarité n'est exclue pour les emprunts que sous conditions alors qu'elle est totalement écartée
en cas de vente à tempéraments53
.Sur ce point, c'est le terrain des approximations ; la doctrine54
invite le législateur à clore un débat parfaitement stérile. La jurisprudence a récemment statué sur
le crédit renouvelable ou crédit « revolving ». Il s'agissait d'un crédit souscrit par un époux, renouvelé
chaque année et ayant été utilisé pour effectuer des achats de faible montant, pour les besoins,
vestimentaires et mobiliers ainsi que ceux de l'enfant commun. Un tel crédit semble entrer dans la
catégorie des emprunts dans la mesure où le juge le soumet à la solidarité ménagère de
l'article 22055
.
Quels sont les effets de la solidarité quant au gage des créanciers ? Dans tous les cas, peu importe
le régime matrimonial des époux, les créanciers peuvent se faire payer sur l'intégralité du patrimoine,
propre ou personnel, de chacun d'eux, ainsi que sur les biens de communauté, si elle existe. En
revanche, les données sont sensiblement modifiées dans l'hypothèse où la solidarité est écartée.
Tout dépendra, alors, du régime sous lequel sont mariés les époux. Si le couple a adopté la séparation,
les créanciers ne peuvent se retourner que contre le seul des époux tenu à la dette, l'autre
sauve son patrimoine personnel. Si le couple vit sous le régime de communauté, l'époux protégé
préserve certes son patrimoine propre mais les créanciers peuvent saisir non seulement les biens
propres de l'époux débiteur mais encore les biens communs (C. civ., art. 1413). Or, dans la pratique,
l'essentiel des richesses d'un couple mariésouslerégimelégal, c'est la communauté. Le bénéfice
de l'article 220 sera, dès lors, bien mince.
Là où la situation se complique, c'est en matière d'emprunt. Si l'emprunt est de ceux qui entrent dans
le champ d'application de l'article 220, alors la communauté sera compromise. En revanche, si
l'emprunt ne répond pas aux conditions fixées par cet article, il faudra alors faire jouer la protection
plus fortedel'article 1415 (cf. infra) qui permettra de mettre à l'abri les biens communs. Ce qui
explique que le prêteur de deniers aura tout intérêt à se battre sur la qualification de «modeste »
de l'emprunt consenti.
Naturellement, dès lors que l'achat à tempérament ou l'emprunt a été contracté par les deux époux,
la solidarité retrouve sa place (art. 220 al. 3 in limine).
53. Un arrêt très net : Cass. 1re
civ., 12juill. 1994, Bull. civ. I, no 252, une vente est justement qualifiée de « vente à tempérament », « dès lors, le
peu d'importance de ces achats étant une circonstance indifférente, c'est à bon droit que le tribunal d'instance (...) a retenu que la dette née de
ce contrat était exclue de la solidarité prévue par l'article 220 du Code civil ».
54. Deux articles très clairs à consulter : Ch. ALLEAUME, « Achats à crédit et solidarité des époux », Dr. famille 1999, chr. no
5et N. RZEPECKI,« Les
opérations de crédit et la solidarité ménagère de l'article 220 du Code civil », JCP 1999.I.148. En fait le problème est que l'article 220 use d'un
vocabulaire du droit civil classique qui ne correspond plus aux pratiques commerciales contemporaines. Pour résoudreleproblème, dans
l'attente d'uneimprobableréforme législative, il faut quelejugeuse d'une interprétation téléologique de ce texte et non purement exégétique.
Une once de hardiesse parfois suffit, à tout le moins réveille le législateur.
55. Cass. 1re
civ.,13 nov.2008, RJPF2009-1/27, obs. Vauvillé ; RLDC 2009/56, no
3273, obs. Evenat.
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