Cours - Droit des régimes matrimoniaux, du PACS et du concubinage - 7e - 90

DROIT DES RÉGIMES MATRIMONIAUX, DU PACS ET DU CONCUBINAGE
ouverture au public générant seule la clientèle73. À la date de l'obtention de l'autorisation préfectorale
de création de l'officine, la clientèle n'est que potentielle. Il importe peu alors que cette date soit antérieure
au mariage, dès lors que l'ouverture au public, entraînant seule la création d'une clientèle réelle
et certaine, est postérieure au mariage. La valeur de l'officine peut alors être portée à l'actif de la
communauté74
.
Subtilité : « une clientèle constituée durant l'union et indépendamment d'unepremièreclientèle
formée antérieurement au mariage ne peut être considérée comme accessoire de celle-ci ; la valeur
qui en découle est donc un bien acquêt »75
.
68 Actions / Droits sociaux. - La situation est évidemment identique pour l'acquisition de droits
sociaux négociables tels que les actions des sociétés anonymes76
.
Néanmoins, les droits sociaux non négociables (parts sociales des sociétés à fort intuitu personae)
ont prêté à discussion77
. Le seul véritable problème posé l'est par l'achat d'actions après le mariage.
). Acquises après celui-ci, le débat rebondit du fait, cette fois, de leur
En effet, si l'achat a eu lieu avant celui-ci, les actions sont des propres sans discussion aucune du
fait de leur origine (art. 1405 al. 1er
nature. Pour résumer les deux principales thèses en présence, les uns soutenaient que les actions,
du fait du droit de vote qu'elles procurent, donnent à leur détenteur un pouvoir personnel fortement
marqué d'intuitus personae ; les autres objectaient que les actions sont surtout un investissement et
doivent être traitées comme tout autre bien. Naturellement les premiers soutenaient la qualification
de propres par nature en vertu de l'article 1404 (sous réserve, le cas échéant, d'unerécompenseà la
communauté) et les seconds retenaient une qualification pure et simple d'acquêts. Ceux-ci relevaient
que ces « droits sociaux non négociables » sont soumis par l'article 1424 à la cogestion et mis sur le
même rang que les immeubles fonds de commerce et exploitation dépendant de la communauté.
Mais c'est là encore prendre une règle de pouvoir pour une règle de qualification. Enfin, essayant de
trouver un compromis, on vit apparaître une troisième thèse : celle des biens mixtes. Le droit pécuniaire
serait commun, tandis que le droit de vote serait propre78
.
73. Cass. 1re civ., 4 déc. 2013, no
74. V. infra,nº 78.
75. Cass. 1re
Saintourens ; JCP 2014, nº 668, note Simler ; AJ fam.2014. 62,obs.Hilt ; Defrénois 2014. 1193, note Champenois ; Dr. famille 2014, no
civ., 17 déc. 1996, Dr. famille 1997, comm. 75 et la note.
76. A. COLOMER, « La nature juridique des parts de société au regard du régime matrimonial », Defrénois, 1978, p. 529 et Les sociétés commerciales
et les régimes matrimoniaux,T. 2 ;G. PAISANT, Des actions et parts de sociétés dans le droit patrimonial de la famille, th. dactyl.
Poitiers, 1978 ; M.-Ch. AUBRY, « Attributions gratuites d'actions et régime de communauté », D. 2019, p. 833.
77. M. GRIMALDI, « Les effets de la rupture à l'égard des époux associés », Gaz. Pal.,26mars 2011, no
85, p. 15 ; V. également L. NURIT-PONTIER,« Conjoint
d'associé : être ou ne pas être associé ? », in Mélanges en l'honneur du Professeur Raymond Le Guidec, LexisNexis, 2014.
78. Sur les stock-options : à l'origine, cette solution paraissait difficile à transposer aux stock-options, divisant la doctrine : R. VATINET,« Le clairobscur
des stock-options à la française », Rev. sociétés 1997. 31 ; A. COURET, « Le sort des stock-options dans les liquidations de communauté ou
de succession : approche critique d'idées nouvelles », JCP N 1999. 525 ; F. SAUVAGE, « Communauté succession et stock-options », Dr. et patr. 1998.
38 ; J.-Ph. MABRU, « Stock-options et liquidation de communauté : argument pour une controverse », Dr.et patr. 1999. 32 ; J.-P. CHAZAL et Y. REINHART,
« La qualification des options de souscription ou d'achat d'actions dans lerégime decommunautélégale », RTD com. 2002. 110 ; E. NAUDIN, « Les
" stock-options " à la dissolution du régime matrimonial », AJ fam. 2002. 290 ; B. VAREILLE, « Communauté et opérations en cours non dénouées »,
JCP N 2009. 1187 ; malgré une contestable réponse ministérielle du 18juin 2001, no
L. Grosclaude : Dr. famille 2001, comm. 119) ; CA Paris 7mai 2004, Dr. famille 2005, no
58031, JOAN Q 18juin 2001, p. 3530 (à ce sujet les critiques de
217, note L. GROSCLAUDE ; RTD civ. 2004. 539, obs. B. Vareille : le
droit d'exercer l'option demeure personnel, mais la valeur patrimoniale des options (différence entre le prix d'exercice de l'option et la valeur du
titre au jour de son acquisition) est commune dans la mesure où l'option a été levée et que sa valeur a été attribuée à l'un des époux avant la
dissolution de la communauté. Position depuis lors confirmée par la jurisprudence : « Si les droits résultant de l'attribution, pendant le mariage, à
un époux commun en biens, d'une option de souscription ou d'achat d'actions forment des propres par nature, les actions acquises par l'exercice
de ces droits entrent dans la communauté lorsque l'option est levée durant le mariage », Cass. 1re
civ., 9 juill. 2014, nº 13-15948 ; D. 2014, 1544 ;
AJ fam. 2014,508,obs. Hilt ; LPA 2014, nº 169, 7, note Zalewski-Sicard ; JCP N 2014, nº 29, act. 821 ; RJPF 10/2014, p. 20, note Vauvillé ; JCP N2014,
nº 44, 1318, Naudin ; Gaz. Pal. 2015, nº 25-27, p. 21, note Dondero ; Ph. SIMLER, « Les stock-options saisies par le droit patrimonial de la famille »,
Defrénois 2017,p. 446 ;Y. CHAUMETTE, « De quelques difficultés liquidatives relatives aux stock-options », Defrénois 2017, p. 453 ; Rev. sociétés 2015,
90
12-28076 ; JCPN2014, no 1099, obs. V. Barabé-Bouchard ; RTD civ. 2014. 937, obs. Vareille ; RTD com.2014. 306, obs.
3, comm. 3.
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