Bibliothèque constitutionnelle et de science politique - Tome 153 - Les normes de concrétisation dans la jurisprudence du Conseil Constitutionnel - 188

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LES NORMES DE CONCRÉTISATION DANS LA JURISPRUDENCE DU CONSEIL CONSTITUTIONNEL

Ainsi, la tradition républicaine n'est pas invocable et la législation concernée
ne touche pas aux droits et libertés fondamentaux, à la souveraineté nationale ou
à l'organisation des pouvoirs publics, écartant alors la possibilité de consacrer un
principe fondamental reconnu par les lois de la République.
196. Enfin, certains considérants de principe ne comportent aucune norme
de concrétisation. Il en est ainsi par exemple lorsque le Conseil précise « qu'il n'y
a lieu, pour le Conseil constitutionnel, de soulever d'office aucune (...) question de
conformité à la Constitution »142. Par ailleurs, le juge constitutionnel utilise régulièrement des considérants de principe en rappelant la norme de référence du
contrôle de constitutionnalité qu'il va utiliser pour rendre sa décision. Or, ne
découle pas automatiquement de chacune de ces normes de référence une norme
de concrétisation. Par exemple, lorsque le Conseil constitutionnel rappelle l'existence d'un objectif de valeur constitutionnelle, préalablement dégagé par lui, il le
fait d'une manière identique à chaque fois, sous une forme standardisée, sans
qu'une norme de concrétisation soit en jeu à ce moment-là. Ainsi en est-il dans le
considérant suivant : « Considérant que la bonne administration de la justice constitue un objectif de valeur constitutionnelle qui résulte des articles 12, 15 et 16 de la
Déclaration de 1789 »143. Ce considérant de principe exprime, dans son intégralité,
une norme de référence seule.
Si la norme de concrétisation ne doit pas être confondue avec un considérant
de principe, il n'en demeure pas moins qu'elle constitue, elle aussi, un vecteur de
standardisation des décisions du Conseil constitutionnel, soulevant la question de
l'intérêt de cette standardisation.
2. Les normes de concrétisation : de l'individualisation par la standardisation
197. Les normes de concrétisation participent de la standardisation des décisions du Conseil constitutionnel. En effet, elles renvoient à l'idée de « modèle habituel » utilisé par le juge constitutionnel, démontrant une certaine constance dans la
jurisprudence du Conseil. Il se trouve d'ailleurs des auteurs pour qualifier certaines
normes de concrétisation de standards. Après avoir cité le considérant de principe
relatif aux dérogations au principe d'égalité utilisé dans la décision n° 96-375 du
9 avril 1996, ces auteurs précisent qu'« il ressort clairement de ce standard jurisprudentiel que l'égalité ne peut être un droit fondamental absolu et inconditionnel, mais au
contraire une norme relativement contingente »144. S'ils ne définissent pas ce qu'ils
entendent par « standard jurisprudentiel », l'on peut toutefois supposer qu'il s'agit
ici d'une définition relevant de l'idée de « standardisation », autrement dit de l'usage
142. Cf., par exemple : décision n° 2009-578 DC du 18 mars 2009, Loi de mobilisation pour le
logement et la lutte contre l'exclusion, cons. 36 ; décision n° 2015-720 DC du 13 août 2015, Loi relative
au dialogue social et à l'emploi, cons. 18. La formulation du juge est parfois quelque peu différente :
« Considérant qu'il n'y a lieu, pour le Conseil constitutionnel, de soulever d'office aucune question de
constitutionnalité » (cf., par exemple, décision n° 2015-711 DC du 5 mars 2015, Loi autorisant l'accord
local de répartition des sièges de conseiller communautaire, cons. 20, nous soulignons).
143. Cf., par exemple : décision n° 2015-715 DC du 5 août 2015, Loi pour la croissance, l'activité
et l'égalité des chances économiques, cons. 57 ; décision n° 2014-704 DC du 11 décembre 2014,
Loi relative à la désignation des conseillers prud'hommes, cons. 20 ; décision n° 2013-356 QPC du
29 novembre 2013, M. Christophe D. (Prorogation de compétence de la cour d'assises des mineurs en cas
de connexité ou d'indivisibilité), cons. 5 ; décision n° 2011-631 DC du 9 juin 2011, Loi relative à
l'immigration, à l'intégration et à la nationalité, cons. 26.
144. P. Gaïa, R. Ghevontian, F. Mélin-Soucramanien, E. Oliva et A. Roux, Les grandes
décisions du Conseil constitutionnel, 17e éd., Dalloz, coll. Grands arrêts, 2013, p. 510.

http://www.142.Cf http://www.143.Cf

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